14 avril 2015, 17:22

WANGO TANGO

Rencontre avec Francis Zégut


 
Wango Tango. Francis Zégut. Un nom d'émission, le nom d'une icône, trans-générationnels. Chez les hardos, les métalleux, les graisseuses et les graisseux français, Tonton Zézé est une figure incontournable, notre oncle, notre pote, notre prescripteur, un modèle. En quarante ans de radio, ce géant des ondes a hanté les secondes parties de soirées de centaines de milliers de jeunes boutonneux, dont le laisser-aller acnéique a entre autres pu contribuer à les nommer ainsi "graisseux", comme toutes ces crinières un brin douteuses dont se sont pourvus mille autres hardos confirmés, adeptes d'un certain charme capillaire, mais modulant leur mulet avec des doigts suintant l'huile de bécane.
Pour l'âge d'or, Wango Tango est l'émission culte de toute une génération qui porte comme étendard, outre ces non-coupes de tifs, des baskets à languettes, des 'tiagues bizeautées, des bracelets de force ou à clous, des vestes patchées assemblées aux Puces ou sur tous les marchés de province, et bien évidemment ce fameux sac US en toile kaki, sur lequel étaient griffonnés au marqueur noir les noms de l'époque : IRON MAIDEN, MOTORHEAD, JUDAS PRIEST, SAXON, mais surtout TRUST ou bien sûr AC/DC. A l'époque, la bande d'Angus Young vient de sortir "Back In Black", qui se vend à plusieurs centaines de milliers d'exemplaires, rien que dans notre pays ; vous le savez, tout est magnifiquement documenté dans le monument "AC/DC : Tours de France 1976-2014" concocté pendant sept ans par Baptiste Brelet et Philippe Lageat - ce pavé désormais historique de plus de quatre kilos témoigne entre autres de l'amour réciproque entre les australiens et les français. Mais Zégut, qui en signe la préface, y est pour beaucoup dans l'affaire, étant tout simplement le premier à diffuser AC/DC sur les ondes de RTL. Au début des années 80, il réunit autant d'auditeurs que tous ces acheteurs amoureux des vinyles d'AC/DC, entre "Highway To Hell", "Back In Black" et "For Those About To Rock", voire "Flick Of The Switch" : si les plus timides ont été séduits par le hard-rock initiateur du single "Hell's Bells", d'autres iront bien plus loin dans l'aventure, franchiront le Styx et se perdront dans son delta, remontant les ramifications éclairées par le père Zégut lorsqu'il se permet, seul et libre, de programmer tous les nouveaux noms du hard-rock et du heavy-metal que ces glorieuses années 80 ont enfanté. Et d'y associer hard FM, rock sudiste, ou pionniers du genre.
Parmi ces centaines de milliers d'auditeurs potentiels (certains clandestins sont sous la couette Mickey avant midnight, un écouteur calé dans la cage à miel pour ne pas éveiller les soupçons des vioques), bon nombre auront lâché l'affaire une fois leur brevet des collèges en poche, leur bac passé, leur biscuit trempé, leur CDI signé, leur armée affranchie, leur prêt immobilier contracté, leur mariage célébré, ou encore leur golden retriever coincé entre bobonne, les mouflets et la dinde sur la photo de Noël. Bref, certains grandissent, débarrassés de leur Biactol et de leur dossard SAXON, la nuque bien propre. Mais d'autres warriors ont survécu, par milliers, et sont restés des purs, voire des durs, et comme disait Churchill, "ne se sont jamais rendus". Et ne se sont jamais vendus. On les croise : c'est vous, c'est moi. Certains ont pris un peu de bide, certains ont le cheveu plus rare, mais tous brandissent le poing dès qu'un riff fait trembler les membranes de leur chaîne hifi - et emmerde toujours autant leurs voisins. On se croise, on se lance un regard dans la rue, on se reconnait : aux concerts, chez les disquaires ou en festival, on devine nos parcours.
Ce qui peut définitivement sceller notre communauté, c'est bien Wango Tango, tant au passé, qu'au présent : en s'associant avec une bande de passionnés chez Warner, notre oncle préféré nous a concocté la bande-son idéale de ses années, de nos années. "Wango Tango", c'est en quatre CDs ou en deux vinyles (au track-listing intégralement différent !) une compilation qui réunit le meilleur du hard et du métal. Pour la version CD, tout l'univers des années 80 est ainsi représenté, du plus soft hard FM au thrash, voire à l'indus de MINISTRY, en passant par tous les géants du metal (METALLICA, VENOM, MOTLEY CRUE, DIO, MSG, TWISTED SISTER, SAXON, THIN LIZZY, et des dizaines d'autres) ou encore les légendes des années 70 comme les STOOGES, le MC5, LYNYRD SKYNYRD et bien sûr ALICE COOPER...
Pour promouvoir cette belle vague de nostalgie qui nous submerge tous avec plus ou moins d'émotion selon notre vécu et notre attachement à ce pilier de la radio, Francis Zégut a été harcelé par tous les médias qui lui ont rendu un sacré hommage, dithyrambique, admiratif et passionné. Zégut a été là avant tout le monde, avant la presse, avant ENFER, avant même HARD FORCE ! Mais nous nous devions à notre tour de faire le point avec l'homme une fois le coffret sorti, et de le cuisiner un peu autour de son immense carrière : on était aussi heureux et enthousiaste d'aller rencontrer le bonhomme que lorsque on a rendez-vous avec nos rock-stars favorites - on parle quand même ici d'un mythe, l'un des derniers des Mohicans des ondes...
Zézé nous a reçu avec une rare gentillesse et une disponibilité totale : on est resté près de deux heures avec lui dans son burlingue du fameux 22 de la rue Bayard dans le huitième arrondissement de Paris, siège émetteur historique de RTL - et de RTL2. Si l'on a pu digresser par la suite autour d'autres sujets et notamment de notre passion commune pour les interminables road-trips estivaux à travers les paysages du grand Ouest américain (pour l'été 2015 la bande-son est d'ailleurs toute trouvée !!!), c'est principalement autour de sa personnalité et de Wango Tango que nous a répondu Francis, avec sincérité, honnêteté, franchise, sans aucune langue de bois, et avec parfois un léger soupçon d'émotion...
Antenne !

 


Bon, premier constat Francis, sans surprise : Wango Tango, la compile, le coffret, c'est parti pour être un succès !
Francis Zégut : Ça a l’air de se présenter comme un succès. Mais c’est au fur et à mesure du temps, en fin de compte c’est au cours des années, cela fait environ quinze ans que je rencontre des gens qui ont 40, 50 ou 60 ans qui écoutaient Wango Tango d’une manière ou d’une autre, et dont la vie a évolué, ils se sont mariés, ils ont eu des mômes, ils travaillent le jour, ils écoutent plus la nuit ; en tous les cas, c’est vrai que pendant dix ans, cette émission a accompagné pas mal de monde - des ados on va dire, des jeunes gens, qui ne savaient pas ce qu’ils allaient faire… ils ont écouté Wango Tango et ça les a incités à devenir musicien, régisseur, journaliste ou attaché de presse. Et les autres, je les ai rencontrés ces dernières années et je me suis rendu compte qu’ils n’avaient jamais décroché ; ça a été tellement fort pour eux ! Moi lorsque je le faisais, c’était un peu une sorte de happening, un bordelo avec des watts, de la connerie dedans, mais je savais qu’il y avait du monde de l’autre côté parce qu’on voyait bien les audiences, mais je voyais rarement les gens. Je les ai rencontrés, certains : début 2000 j’en ai croisés qui revenaient : « Ah putain on écoutait, ça nous a changé la vie ! ». Ce succès n’était pas prévisible, mais on y pensait. Bon, on n'a jamais les clés du mystère hein, mais là on s’aperçoit qu’on a fait un truc fort pendant dix ans, on ressort ça trente-cinq ans après parce que Wango Tango a démarré en 1980, et ça fonctionne toujours. Ca été très fort, quelque part ; c’est le message et la vocation de la radio pour moi : c’est de faire un programme, que ça passe de l’autre côté, et que les gens l’attrapent comme ça, fort, qu’ils le collent contre leur coeur, et que trente-cinq ans après, ils se souviennent.



Comment as-tu procédé à la sélection des morceaux qui allaient constituer l'intégralité des deux coffrets ? Tes choix personnels et incontournables ? Ce qui était possible de faire au regard des problèmes de droit ? Ce qui était judicieux pour attirer un public ouvert ? Ce qui reflétait in fine la programmation habituelle de Wango pendant dix ans ?
Francis Zégut : Alors écoute, la programmation de Wango Tango, c’est ce qu’il y a à l’intérieur : il y a eu du VENOM, du METALLICA, du MAIDEN, mais en même temps du MARILLION, et... et du AUTOGRAPH ! Mais ouais, mais même BALANCE, en fin de compte, ce sont des hymnes ! Certains se souviennent de ça parce que c’étaient des putains de morceaux avant tout, qui ont fait le tour du monde et qui ont marqué. Et puis il y a le MC5 ou les STOOGES, et LYNYRD SKYNYRD aussi, et BLACKFOOT, le rock sudiste : parce que Wango Tango c’était aussi ça, pas uniquement du metal pour le metal, c’était une sphère avec du metal, et du rock et d’autres dérivés à l’intérieur. Je ne vais pas comparer Pop Rock Station avec Wango Tango à l’époque, ce n’est pas exactement la même chose, en tous cas c’est la même volonté de passer des trucs et d’en faire découvrir d’autres, de faire goûter autre chose qui n'est pas forcément ce que l’on a envie d’écouter, et se dire « ah ouais mais putain c’est pas mal quand même son truc !». Voilà, poser la question, aiguiser un peu la curiosité, quoi ! Ce qui est pour moi fondamental pour faire une émission de radio, à fortiori avec de la musique. 

Tu es toujours d'un enthousiasme quasi juvénile en ce qui concerne tes coups de coeur ; est-ce qu'il y a néanmoins des choses ici qui ne répondaient pas forcément à tes goûts personnels ?
Francis Zégut : Non non. C’est passé dans Wango Tango, c’est à l’intérieur du coffret… j’ai dû en demander 200, 250 titres parmi lesquels choisir ; j’ai demandé à quelques auditeurs d’en proposer, j’ai reçu quelques mails. On a mixé tout ça, et puis après c’est « oui », « non », « on peut pas », « le manager a changé », « le manager a une mémoire de poisson rouge », bla bla bla. Y en a qui se sont souvenus, comme Nikki Sixx de MÖTLEY CRÜE, comme MOTÖRHEAD, comme METALLICA ou comme MAIDEN, que dans les années 80, en France, on avait passé leurs morceaux et leurs groupes, et puis y en a d’autres qui ont oublié, et puis y en a d’autres qui ne se compilent pas du tout. Après, y en a qui regrettent qu’il n’y ait pas, comme sur la compile de 1984, des dialogues de Wango Tango entre les morceaux : c’est plus possible ! Dans les années 80, on ne se posait pas la question, on se tapait dans la main et youpi, on le faisait, super ! Maintenant la société est devenue procédurière, à l’excès, c’est à dire que quand tu prends un morceau tu dois aller jusqu’au dernier dixième de seconde, t’as pas le droit de commencer avant la fin du morceau, de parler pendant l’intro du morceau, ce qui a été fait sur celle de ’84, et ce qui a été fait dans l’émission où je parlais rarement à blanc entre deux morceaux, mais je commençais à la fin quand c’était shunté, quand c’était cut, on mettait un fond sonore et je délirais par dessus, maintenant tu ne peux plus rien mettre, c’est devenu d’un chiant terrible ! C’est pour ça qu’on a refait un Wango Tango le 30 mars, dans l’esprit, avec des morceaux d’époque ; parce que pour l’émission, tu es plus libre, tu peux refaire plein de choses : mixer, monter, produire des choses de manière différente. Quand tu vends un produit qui est commercial, tu dois respecter à la lettre, au dixième de seconde près ce dont les gens signent une lettre accord - ou pas. Donc on fait dix douze jingles, que j’ai refait moi à blanc, sans musique dessous et qui sont disponibles dans le vinyle avec un code spécial à télécharger, et on a refait un Wango Tango pour montrer aux gens qui connaissaient, pour leur rappeler des souvenirs, et à ceux qui ne connaissaient pas pour découvrir. 

Parmi tous les remerciements et autres clins d'oeil, tu insistes et remercies particulièrement Peter Mensch, le manager de METALLICA, pour vous avoir autorisé à inclure "Jump In The Fire"... 
Francis Zégut : Ouais alors Peter Mensch je le connaissais dans les années 80 à l’époque où il était déjà manager de DEF LEPPARD et du MICHAEL SCHENKER GROUP - et il y en avait d’autres… Quand on a demandé à avoir METALLICA, ce qui me paraissait, euh, déjà très justifié vu qu’on a été les premiers à passer le groupe, la maison de disque nous a répondu non. Donc par le biais d’un mec de chez Warner, on a eu le mail de Peter Mensch, et on lui a envoyé un message, en lui précisant qu’on a été les premiers à enregistrer METALLICA en France, lors de la première partie de VENOM à Balard. Le mec a répondu dans la journée : « ah bon ? Vous avez ça ? Je veux écouter le son ». Donc on a fait un mp3 de ça, on l’a envoyé à Peter Mensch, et le lendemain, il nous a renvoyé un mail, via la maison de disque, en nous demandant quel titre on voulait. 

N’y voit-on pas là un compromis pour alimenter un peu plus tard les rééditions à venir de tout leur catalogue, qu'ils nous promettent riches en exclusivités et raretés, ayant d'ailleurs ouvert toutes les suggestions et témoignages des fans ?
Francis Zégut : Ecoute, je sais pas, mais juridiquement s’ils s’en servent, ils vont obligatoirement être obligés de repasser par nous vu que c’est un enregistrement RTL. S’ils veulent l’utiliser, nous on est plutôt fier et ça ramènerait trois cahuètes, en tous les cas sur ce, non pas un coup de poker, mais sur cette argumentation directe avec le manager on a réussi à déclencher quelque chose - et autrement ça n’aurait pas été possible. Ah mais tu vois, on a vraiment bossé, parce que entre l’idée qui est née il y a un peu plus d’un an maintenant et les demandes d’autorisations, on a bossé ! Moi pour faire les textes, et de l’autre côté chez Warner au niveau du juridique, pfiou, c’est du juridique, tu t’attaches les cheveux. Quand t’aimes la musique tu te dis « super, allez on enchaîne », et puis en fait non, là tu peux pas faire ça parque que tout est controlé. Et malheureusement on vit dans un mode qui est comme ça. 

Bon, les grands grands absents, c'est immanquablement AC/DC...
Francis Zégut : AC/DC et LED ZEPPELIN, ça n’est jamais compilé.

Mais est-ce qu’il y a eu des tentatives, vu votre histoire, votre fidélité, votre respect mutuel : tu as accompagné AC/DC pendant toutes leurs premières années, et immensément contribué à leur popularité chez nous !
Francis Zégut : Oui, oui, oui, bien sûr qu’il y a eu des tentatives, mais ça ne se compile pas. Point à la ligne. Alors, voilà, c’est tout. Alors oui, c’est chiant, c’est frustrant, mais ce n’est pas très grave non plus parce que lorsque tu regardes la liste des 61, y a quand même du beau monde, y a quand même des belles pépites...

Ouais, il y a les immanquables, les ténors, mais aussi certains morceaux plus obscurs que bon nombre d'auditeurs ne doivent pas forcément connaître ! Au-delà de l'émission, la compile Wango Tango c'est un peu le tour d'horizon ultime et exhaustif de l'âge d'or du hard-rock...  
Francis Zégut : Oui c’est un peu ça, c’est pas un best-of… on pouvait passer quelques petites perles qui ont eu du succès ou pas, mais l’important pour moi dans la musique c’est que si ça plait à 100 000 je suis ravi, mais si ça ne plait qu’à 10, je suis ravi de la même manière. C’était avant tout guidé par la sonorité, la mélodie, les arrangements derrière… Voilà, là t’as un WHITESNAKE qu’est pas comme d’habitude, et même AUTOGRAPH, « Turn Up The Radio » t’as juste envie de te lever et de chanter… Y a aussi un KIX ; voilà c’est aussi cet âge d’or, cette renaissance du côté américain après les Anglais où le hair metal est arrivé en composant des hits, parce que tout s’est vendu à des millions d’exemplaires ; ça a été les Dix Glorieuses du metal, 80-90… L’avènement d’AC/DC avec « Back In Black » jusqu’au « Black Album », puis après 1994 avec « Nevermind ». Et puis après ça a été terminé. A partir de 1995, c’est le formatage qui est arrivé dans l’histoire, en télé, en radio. Ça a fait des trucs bien carrés, bien propres, pas de guitare ça fait fuir la ménagère et pour le marketing c’est mauvais, donc voilà…

Tu parles dans le livret d'une collection de 5000 vinyles, alors que tu commençais l'émission : c'était déjà énorme pour l'époque !
Francis Zégut : Ecoute, déjà je dormais dans une toute petite piaule qui devait faire 15 m2, avec un matelas par terre et tous les murs c’étaient des vinyles. J’ai acheté mon premier 45-tours en 1962, c’était « Love Me Do » des BEATLES et après, j’ai pas arrêté d’acheter du metal, ou LED ZEP quand j’avais quinze-seize ans, mais avant j’avais acheté du vrai rythm' & blues, du Otis Redding, Jimi Hendrix, après je suis arrivé à RTL, il y a eu les punks et la new-wave ; je connaissais tous les albums par coeur : les intros, les fins, les durées, là où ça a été enregistré, avec qui… Quand j’ai fait la maquette de Wango Tango, ça m’a semblé évident parce que j’aimais déjà le metal quand j’avais 15 ans, pour moi c’était évident de gueuler en même temps, parce que les mecs chantaient en gueulant et forcément il y a eu de la déconnade parce que j’étais comme ça avant. Même si on est arrivé avec la bonne idée au bon endroit, ce qui peut paraître comme un peu de bol, en même temps que tout, mais il y a pas vraiment de hasard : il y a de la chance, et puis il faut arroser tout ça. Parce qu’avec 5000 vinyles chez moi ça m’a permis d’avoir une culture derrière, vis à vis du metal mais aussi plein d’autres choses : c’est comme ça que je me sois retrouvé à être programmateur d’Hebey (NDJC : Jean-Bernard Hebey, célèbre animateur radio et à l'époque chargé de la programmation à RTL...), à pouvoir diffuser les SEX PISTOLS et AC/DC en même temps, parce que je connaissais tout ce qui s’était passé depuis ’62. S’il y a une part de chance, elle s’arrose ; t’arrives pas avec les mains dans les poches, quoi…

N'étais-tu pas parfois frustré à l'époque, de devoir rester tous les soirs à l'antenne pendant que les copains partaient s'éclater aux concerts dont tu pouvais faire la promotion, à l'Espace Balard, au Bataclan, à Bercy, au Pavillon de Paris puis au Zénith ? 
Francis Zégut : Oh j’en ai fait quand même pas mal, tu sais… au début Wango c’était le vendredi, après le vendredi et le dimanche, et après ça a mis trois ans à passer en quotidien. Alors pendant trois ans, jusqu’en 83, 84, j’ai quand même vu beaucoup de choses. Alors écoute : c’est un choix hein, moi je faisais un concert en faisant Wango Tango, j’étais debout avec les micros, la guitare en carton, je terminais j'étais ruiné de sueur... Alors oui, j'ai loupé plein de concerts, mais en même temps j'ai fait plein d'émissions fantastiques où on a partagé notre amour pour ce style musical - et pour la musique plus globalement.

On sait que l'idée de ce coffret est née après les innombrables témoignages d'affection et d'admiration que t'adressent des légions de quadra, de quinquas ou même de mecs de 60 ans qui ont grandi avec toi : as-tu été surpris par ces éloges, ces déclarations d'amour du public ? 
Francis Zégut : Si si... mais à un moment tu sais plus trop quoi dire ; je suis moi-même, je vais pas m'inventer un personnage... même si avec Wango j'aurai pu partir... mais ça ne m'a jamais effleuré l'esprit. On avait des gens qui venaient assister à l'émission ; quand ils voulaient aller boire un coup, un JB ou une bière, hé bien on y allait... J'ai toujours été comme ça, je ne me suis rien inventé. C'est peut-être ça qui a touché les gens...

Le côté "vrai", c'est clair...
Francis Zégut : Oui, oui, c'est ça... Je suis en phase avec moi, je sais pas si c'est vrai ou pas.

Les gens de la presse sont un peu trop dans l'ombre et donc trop peu charismatiques pour leurs lecteurs, et les "stars" de la TV sont, elles, inaccessibles. Mais à travers la radio, seul compromis fédérateur, ils ont trouvé leur leader, leur voix, leur patriarche...
Francis Zégut : Ecoute, la radio c'est un peu comme avec la lecture ; pas la presse, mais la lecture : il y a un côté fantasmagorique. Tu peux t'insérer dans un chapitre, une émission, un personnage sans le subir. Donc, quand tu parles à la radio, les gens vont attraper quelque chose : ils te voient pas, ils s'en foutent. Y a pas un problème d'image, il est beau, il est vieux, elle est blonde ou machin : ça, ça n'apparait pas dans l'histoire, c'est juste ce que tu vas dire. Donc je pense que c'est beaucoup plus juste, et beaucoup moins voilé que la télévision où tu subis quelque chose... Et si t'es normal ou cool, ça passe de l'autre côté. J'ai eu plein de gens, en province, qui m'ont dit "allez viens boire un coup", et qui m'ont dit "putain t'es exactement comme à la radio, y a rien qui change et tout...". Ben non, qu'est-ce que tu veux que je te dise ?

Plus qu'un DJ, plus qu'un "pousse-disques", tu as entretenu et développé une mythologie populaire, péri-urbaine, gouailleuse et un brin grossière : comment es-tu de suite rentré dans la peau de ce personnage ? 
Francis Zégut : J'ai toujours été comme ça. Avant je déconnais, je balançais des vannes à la con, c'était un mélange de verlan, d'Audiard, de plein de trucs comme ça, mais j'étais comme ça à la base. Je déconnais, et après j'ai eu mes points de repère, ma façon de faire, et c'est vrai qu'après c'est devenu comme une espèce de bande-dessinée pour moi ! Tu vois, les Bidochons de Binet, avec les mômes d'un côté, bordelo rebelles qui foutaient le boxon avec leur musique, et de l'autre côté les vieux avec leurs pantoufles, tu vois l'archétype du mec qu'aime pas les mômes, qu'aime pas les jeunes...

Y a plein d'imagerie populaire franchouillarde des années 70 que l'on aime tant : toutes tes expressions, personnages et délires, pour la plupart mythiques, sont restés ancrés dans l'esprit des gens. Tonton Zézé ou un mélange entre Coluche, le Bernie Bonvoisin des tous débuts de TRUST, sous grosse perfusion Michel Audiard comme tu le mentionnais, ou encore San Antonio, mais aussi cette sensation d'avoir depuis le transistor un meilleur copain, virtuel, grande gueule, déconneur et surtout initiateur...
Francis Zégut : Ouais, y a des mecs qui viennent me voir en me disant "ouais, j'suis un de tes neveux" ; alors si je suis un pote, ou un oncle, ben écoute ouais y a forcément une notion de famille ou en tout cas un lien qui s'est tissé durant toute cette histoire. Ouais, je suis content, j'aimerais que la vie puisse se passer comme ça pour plein de monde, pour plein de métiers... Je suis naïf hein, parce qu'au fur et à mesure du temps où j'étais super ouvert vis-à-vis de gens, je me suis aperçu que certains m'ont niqué entre guillemets ou en profitant de l'histoire... M'enfin voilà quoi, j'ai envie de toujours faire confiance aux gens, même si je me fais avoir, quoi... Tu discutes, tu machin, t'installes un truc et puis après tu t'aperçois qu'un jour, trois semaines ou un mois plus tard PIM ! Ouh-lààààà ! Qu'est-ce qui se passe ? Mais j'ai envie de croire en l'être humain...

Tout était-il spontané comme on le devine ou bien t'arrivait-il d'écrire et de préparer à l'avance quelques délires ?
Francis Zégut : Non non non, j'ai pas écrit, j'ai rien écrit. Juste quelques notes pour des jingles sur les départs, mais toutes les autres histoires c'était plutôt reniflé dans la rue effectivement ; alors oui, je chopais p'têtre un mot ou une situation comme ça que je me ramenais, mais autrement c'était vraiment de l'impro à 95%.

Alors comment se déroulait tes journées chez RTL, avant l'émission ?
Francis Zégut : Hebey à l'époque, qui faisait "Poste Restante" et pour qui j'ai fait la maquette de Wango, il m'appelait "l'homme au sac en plastique", parce qu'à chaque fois j'arrivais à la station, même le samedi et le dimanche, alors que j'avais rien à y foutre, mais je venais parce que j'étais en face de gens qui faisaient de la radio rock que j'écoutais avant et je me disais "putain les mecs i' sont bons, ils sont drôles et tout", et j'arrivais toujours avec mes disques que je venais d'acheter chez Clementine, Gevaudan, j'avais toujours un sac en plastique avec de la musique à l'intérieur. Donc ça ça a toujours été avant la radio, je passais mon temps à chercher des trucs, à être curieux... Et je le suis toujours d'ailleurs ! Et écoute, cette curiosité m'a aidé au fur et à mesure du temps. Hebey il m'a vu arriver avec des trucs, genre j'ai ramené le premier album de U2, et il l'a passé à l'antenne en me disant "putain c'est vachement bien", alors pour moi...! L'ambition que j'avais, c'était d'être programmateur. Donc j'achète un disque, Hebey il le trouve bien alors il le passe à RTL. Putain ! D'un seul coup je me disais "Waow, c'est dingue ce truc-là !". Comme quand je faisais le standard des "Routiers Sont Sympas" j'avais acheté un album de SUPERTRAMP, et le réalisateur avait trouvé ça génial et il l'avait passé aussi à l'antenne. Pour moi, c'est incroyable : la musique qui m'accompagne depuis tant et tant et tant d'années, eh bien je peux la passer : je peux la passer à un mec qui va la mettre à l'antenne et qui va pouvoir la partager à d'autres. Ça, pour moi, c'est la radio, la transmission.

Ouais, on valide tes choix...
Francis Zégut : Oui oui, carrément sur ces deux trucs ; après j'ai passé plein d'autres trucs tout seul, mais en tout cas je me souviens de ça comme ça m'avait fait plaisir ; pas d'une manière égocentrique, mais bien d'une manière passionnelle vis à vis de la musique. Oui, il y a des pros qui à un moment prennent le disque de U2 et le mettent à l'antenne, ça veut dire que je ne me suis pas trompé. Alors, dans la musique, tu peux aimer des choses, mais qui se cassent la gueule et ne fonctionnent pas, etc, mais un jour y en a un qui fonctionne et là t'as raison de continuer de chercher, de gratter à droite à gauche ; maintenant, tu fais ça sur internet, mais à l'époque c'était avec les vinyles - et il n'y avait même pas de CDs...

Au quotidien, tu concoctais ta playlist dans la journée avant l'émission, ou bien tu pouvais, là aussi, improviser et passer ce que tu avais en tête et sous la main ?
Francis Zégut : Ah mais oui, ça m'arrivait d'arriver à Wango avec une pile de disques et d'en diffuser des morceaux au fur et à mesure, selon l'envie en disant tu passes un truc, t'as une idée, t'as une intro qui fait tant de temps, tout ça, ça faisait que oui ça m'arrivait de faire des programmes complètement improvisés.

Comment était l'ambiance dans les studios ? Frénétique, sauvage ?
Francis Zégut : Alors l'ambiance déjà, c'était à fond pour commencer... je crois qu'on a pété quelques paires d'enceintes JBL - ils étaient contents ici... Et puis il y avait donc ces deux micros, la guitare en carton, et à la fin j'étais rincé de sueur ; alors il y avait soit des gens qui venaient assister à l'émission, on se couchait très tard parce qu'une fois que t'as fait l'émission Wango Tango, tu peux pas t'endormir dans l'heure ou les deux heures tu vois, alors t'allais en boîte, au Bus Palladium où ils passaient de la putain de musique à l'époque, voilà, on se mettait minable, on faisait la tournée, on se couchait à six-sept heures, on se levait à quatre-cinq heures l'après-midi, ça fonctionnait comme ça quoi... Rock 'n' roll !    

Ca fait rêver, ouais...
On peut souvent t'entendre te définir comme un passeur, un transmetteur - pour reprendre l'imagerie radio - et un guide, beaucoup n'en sont pas revenus ! Un guide musical, un guide spirituel, une espèce de druide !

Francis Zégut : Ah ça, c'est la barbe ! Oui écoute c'est vrai... J'ai fait découvrir à la fin des années 90 SIGUR ROS qu'était carrément toute autre chose que du metal, mais en tous les cas je trouve cette musique et ce groupe incroyables... Je crois qu'elle définit parfaitement leur pays, l'Islande, où en même temps c'est feu et glace, où il y a une sorte de mélancolie dans leur histoire, mais c'est sublimement fait, même si certains au début m'ont dit "mais c'est quoi ta musique avec des cris de chat, là ?" Bon écoute pépère, t'inquiète pas là... Au fur et à mesure du temps, tu rencontres d'autres gens, d'autres humains avec qui tu partages ou pas des choses. Mais la musique, oui, pour moi, c'est un vrai langage universel, donc en fonction des gens que tu rencontres, des émotions que t'as, ben, il y a une musique que tu vas aimer un jour parce que t'es dans un état particulier, et le lendemain tu passeras à côté parce que t'es plus dans le même état. La musique, c'est une vrai émotion, c'est la bande-son d'une vie... tu coupes tout, tu regardes un film et tu coupes la bande-son, pas de musique, où on est, tu vois ? Et la vie, c'est le son, même une Ferrari, c'est de la musique, ça fait pas un bruit. Et c'est ça qui est extraordinaire, la musique est un vrai pouvoir, intimement lié avec les émotions ; alors que les images toutes seules, tu prends un film de science-fiction en 3D, les Avengers le retour de la vengeance, tu mets le film sans musique, hé bien tu peux le mettre à la poubelle, tu vois ?



Wango Tango s'est hélas éteint il y a 25 ans, abruptement...
Francis Zégut : On essaie toujours d'y croire tu sais... On a eu à l'époque un directeur - dont je tairai le nom - ou qui voulait mettre fin à l'émission, ou qui n'aimait pas trop le metal, ou les deux choses en même temps ; et puis voilà, ça s'est arrêté comme ça quoi... Ca m'a fait mal... comme on fait un métier lié aux audiences, ça fonctionnait pourtant encore super bien. Y avait GUNS N'ROSES, y allait y avoir l'avènement de NIRVANA qui arrivait, et puis encore RAGE AGAINST THE MACHINE ou SOUNDGARDEN, beaucoup de choses qui allaient arriver après, NINE INCH NAILS et FAITH NO MORE, etc... Bon, on ne va pas refaire l'histoire. En même temps, ça a été dix années pleines pour moi...

Sans nostalgie aucune, on n'est pas là pour pleurer, mais est-ce qu'on peut dire que Wango Tango représente le sommet de ta carrière, même si tu es toujours bel et bien présent derrière le micro tous les soirs dans Pop Rock Station sur RTL2 ?
Francis Zégut : Oui oui oui, bien sûr. Je suis fier - c'est pas de la fierté, mais je suis heureux de ce que j'ai fait... il y a trois trucs dont je suis fier à travers ma carrière dans la musique, c'est Wango Tango indéniablement pendant dix ans, après y a eu ZicWeb à la fin des années 90 sur RTL où on a mêlé internet et la musique, alors qu'à l'époque internet c'était pas encore du business, mais encore de la liberté et de la créativité, et enfin Pop Rock Station dans l'état actuel des choses où je fais la prog et où je peux mélanger AUTOGRAPH avec REM plus quinze minutes de PINK FLOYD.
 


 

L'émission H Puissance 3 a-t-elle été une tentative de relancer le truc au début des années 90 ?
Francis Zégut : Ouais H Puissance 3 ça a été un truc un peu plus convenu parce qu'il y a eu la création de MCM, et ils voulaient faire un hit parade du metal toutes les semaines comme ça pouvait marcher alors, avec une version télé et une version radio, mais c'était qu'un hit-parade, quoi...

On allait pourtant bien au-delà du hit-parade : par exemple, tu as été le premier à diffuser du RAGE AGAINST THE MACHINE quand c'est tout juste sorti en 1992 !
Francis Zégut : Oui, il y avait aussi un côté découverte, c'est vrai qu'on a été les premiers à passer ça. Ensuite ouais on a continué sur MCM, et après on a fait Blah Blah Metal, et puis voilà, au fur et à mesure du temps, la télé s'est elle aussi formatée en même temps que la radio, même si MCM ça a duré pratiquement dix ans jusqu'au début des années 2000, avec le temps ça s'est quand-même étiolé parce que tu pouvais plus passer ça parce que ça fait du bruit...

Qu'est-ce qui a donc drastiquement changé entre TA radio et la génération suivante ?
Francis Zégut : Ouais, pour moi '95 c'est une année fatidique, un changement où le market', le business est rentré dedans en provenance des Etats-Unis, et où on a commencé à faire de la heavy rotation chez NRJ et après tout le monde a fait pareil derrière... balancer quinze ou vingt fois le même morceau par jour en se disant qu'un auditeur n'en écoute qu'une heure trente... Et c'est aujourd'hui même ce que l'on reproche aux radios, de passer tout le temps le même disque. C'est un peu contradictoire ; quand tu regardes la télé c'est pareil, Canal+ c'est pareil ; y a plus rien, il ne se passe plus rien, tout est très convenu.

Néanmoins dans Pop Rock Station on peut estimer que tu as encore toute la liberté et la latitude de faire ce que tu veux... Tu es quelqu'un, une personnalité, un nom, les gens t'aiment pour ça et tu ne vas pas être contraint de passer du PLACEBO toutes les demies-heures...
Francis Zégut : Non non non c'est vrai... Tu vois j'ai 62 balais, et je ne vais pas me mettre à passer du Top 40 tu vois... Non, ce qui est triste c'est que t'as encore deux mecs : Lang sur RTL et moi où on peut encore faire des progs', mais une fois qu'on sera partis... justement, la FM qui au milieu des années 90 a cultivé des amuseurs publics, Cauet, Arthur, etc, a quand même oublié de cultiver des mecs qui avaient une culture musicale - c'est pas ce qu'on demandait à la radio en la formantant, c'est, "tu cites cinq fois le nom de la radio, tu donnes pas ton avis, tu fermes ta gueule, et t'as une box de 25 secondes pour le faire". Alors les mecs qui avaient un tant soit peu de culture musicale, à force de se faire taper sur la tête pour devenir carré, tu rentres dans le moule et puis voilà... c'est d'une grande tristesse...

C'est un peu pareil avec le rock en général : aujourd'hui il ne se passe plus grand chose de si terriblement excitant : on peut même dire que la toute dernière rock star, la toute dernière icône, c'est Kurt Cobain... Depuis le rock devient un peu un musée, non ?
Francis Zégut : Ouais, ouais, le rock un musée, moi j'ai un petit peu de mal qu'on mette David Bowie dans un musée, euh, en poussant un peu jusqu'au bout on pourrait dire que les deux derniers qui sont devenus des grosses super stars, les deux groupes c'est COLDPLAY et MUSE, qui sont arrivés à la fin des années 90. Mais tous les deux après avoir fait deux ou trois albums assez magnifiques et différents, ils se sont faits rattraper par le business, sont devenus des machines à faire du fric et ont oublié l'inspiration qu'ils avaient lorsqu'ils avaient le ventre un petit peu creux, quoi. 

Oui, et je dirai même plus qu'on ne peut même pas les comparer aux icônes et aux géants du rock depuis les années 60 parce que, comme tu dis, ils ont de suite basculé dans le stadium rock typique des années 80, sponsorisé par Pepsi ou MTV...
Francis Zégut : Et ils ont perdu leur moelle...

Le seul a avoir gardé la tête haute et à faire son propre truc, en gardant la quintessence du rock, c'est Jack White...
Francis Zégut : Oui parce que c'est un virtuose. Un des problèmes c'est que l'informatique musicale a démocratisé l'histoire ; on a bien vu qu'aujourd'hui les stars de maintenant ce sont les DJs et non pas les guitar-heroes de l'époque. Quand t'étais un guitar-hero, tu pouvais tout faire après : Jack White est un guitar-hero et il peut se permettre de faire des choses. On a réduit la musique à portion congrue, juste dire que ça fait vendre, qu'il y a des classements, mais on a bien oublié la musique par elle-même. Quand t'écoutes les FM maintenant, il n'y a plus de guitare électrique. On met un petit fond électro...Je ne fais pas la chasse à l'électro, je ne l'ai jamais fait pour aucun style musical, mais entre le bon électro et l'électro de foire qu'on met derrière parce que ça pas faire fuir la bonne ménagère de moins de cinquante ans parce que les guitares ça fait peur, moi je suis un peu triste de me dire que des jeunes filles ont eu quinze ans quand Kurt Cobain sortait ou se suicidait, elles ont maintenant quarante ans, deux mômes, un mari, un boulot, elles ont aimé NIRVANA - et on ne leur met même pas NIRVANA : c'est quand-même triste !

Comme on le disait, tout au long de ta carrière tu as voulu partager avec enthousiasme toutes tes découvertes et tes coups de coeur, à la radio ou sur ton blog ; on pense entre autres à ELECTRIC MARY récemment, qui ne décolle pourtant pas malgré toutes ses qualités, ou encore les RIVAL SONS que tu plébiscites à mort... Est-ce que ces groupes génèrent encore chez toi le même genre de bouleversements que pouvaient te faire les AC/DC, THIN LIZZY ou METALLICA à l'époque ?
Francis Zégut : Oui, oui bien sûr ! Alors je vais te raconter une histoire qui a démarré une dizaine de jours : un petit groupe de Mulhouse qui s'appelle LAST TRAIN. Une petite nana m'a appelé un après-midi : "aah ils aimeraient bien faire une session acoustique avec toi" - et bien "file-moi un lien que je regarde ! ". La nana m'envoie un lien sur youtube, je le regarde, et je vois la gueule de ces mômes et je me dis "putain ! C'est quoi ce groupe anglais ou américain ? J'hallucine ! Ca m'a fait le même effet que certains autres groupes de l'époque. Je dois aller les enregistrer lundi à la Flèche d'Or. Et je suis tombé sur ce groupe de môme de Mulhouse et je me suis dit "comment c'est possible ?". C'est pas du metal, c'est un mélange là entre ARCTIC MONKEYS et BLACK SABBATH, des trucs un peu plus britons mais ils ont tout : l'attitude, enfin d'abord ils composent de putain de chansons, ils ont les mélodies, l'image, les p'tites gueules, ce petit côté arrogant qui est pas déplaisant... Ah la la, je voudrais te montrer l'état dans lequel j'étais quand je les ai découverts !

Zégut, c'est aussi ce blog, incroyable, sobre, mis à jour quotidiennement, populaire et complètement à ton image et à ton univers, pertinent et avec une info dosée... et c'est aussi la chasse au scoop des annonces de concerts incroyables et autres spéculations d'affiches de festivals !
Francis Zégut : Ouais, ça c'est vrai. A 99% des fois j'étais dans la vérité - une ou deux fois ça a foiré mais ça devait pas foirer... Ecoute, c'est bientôt quarante ans de musique et de gens qui se sont appréciés à un moment ou à un autre, des gens qui ont écouté Wango Tango et qui sont devenus autre chose, c'est ce qu'on appelle des réseaux, tout simplement ! Mais c'est génial, ouais, d'être là avant ! Là je suis en train de parler de l'AC/DC 2016 ; mais on me dit "ben attends, ils sont pas encore passés !". Oui, mais moi, je vais te le dire !  


...Entre temps, Francis bataille sur son PC pour enfin accéder aux vidéo-clips de son immense coup de coeur, LAST TRAIN. Let there be light, let there be sound : l'homme est extatique. Derrière ses lunettes, des yeux juvéniles s'agitent et s'expriment avec émotion, on devine un sourire derrière son épaisse barbe de bon gars, de bon grand-père bienveillant et protégeant ses trésors. Derrière la silhouette de vieux routard biker sympathique, on perçoit ce même enthousiasme palpable, rare et émouvant : s'il a déjà dû visionner des dizaines de fois ces trois clips incroyables alimentant un groupe très prometteur, ses yeux ne perdent pas une miette des images et il fredonne les paroles, fasciné. Devant les clips de ces quatre gamins de l'est de la France, il s'émerveille : "ça existe toujours". Ouaip, en effet...

Blogger : Jean-Charles Desgroux
Au sujet de l'auteur
Jean-Charles Desgroux
Jean-Charles Desgroux est né en 1975 et a découvert le hard rock début 1989 : son destin a alors pris une tangente radicale. Méprisant le monde adulte depuis, il conserve précieusement son enthousiasme et sa passion en restant un fan, et surtout en en faisant son vrai métier : en 2002, il intègre la rédaction de Rock Sound, devient pigiste, et ne s’arrêtera plus jamais. X-Rock, Rock One, Crossroads, Plugged, Myrock, Rolling Stone ou encore Rock&Folk recueillent tous les mois ses chroniques, interviews ou reportages. Mais la presse ne suffit pas : il publie la seule biographie française consacrée à Ozzy Osbourne en 2007, enchaîne ensuite celles sur Alice Cooper, Iggy Pop, et dresse de copieuses anthologies sur le Hair Metal et le Stoner aux éditions Le Mot et le Reste. Depuis 2014, il est un collaborateur régulier à HARD FORCE, son journal d’enfance (!), et élargit sa collaboration à sa petite soeur radiophonique, HEAVY1, où il reste journaliste, animateur, et programmateur sous le nom de Jesse.
Ses autres publications

2 commentaires

User
Jean Chri
le 20 avr. 2015 à 09:34
L'infame Zorglub, VIP de la Nouvelle Calédonie pour Hard Force !<br />
User
Stéph
le 20 avr. 2015 à 09:52
super l'interview, toujours autant de plaisir à lire ou écouté Tonton Zézé :) ♥
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