22 avril 2016, 20:39

Chris Cornell

@ Paris (Le Trianon)


Si les passages de SOUNDGARDEN sont trop rares dans l’Hexagone depuis leur reformation en 2010 (un Zénith de Paris, un Hellfest et aucun concert pendant la tournée en promotion de « King Animal »), son chanteur/guitariste Chris Cornell quant à lui n’est pas avare lorsqu’il s’agit de partir sur ses désormais fameuses tournées acoustiques pour défendre ses albums solo. Et mine de rien, ses tournées marchent très bien et les fans continuent d’y revenir, comme en atteste le Trianon qui affiche complet ce soir (configuration entièrement assise, pas de fosse).

En hors d’œuvre le public est déjà à la fête avec l’excellent FANTASTIC NEGRITO, un guitariste/chanteur d’Oakland (accompagné par un claviériste) qui nous propose un set varié, entraînant, plein de feeling et d’émotion, le tout saupoudré d’un bon sens de la formule. Vraiment réjouissant !

Quelques minutes plus tard, alors que sur scène un disque vinyl tourne toujours sur la platine en guise d’intro, Chris Cornell débarque, acclamé tel un messie et commence d’entrée à se mettre le public dans la poche, même s’il n’en avait pas vraiment besoin, en le faisant rire d’abord en stoppant le vinyl, visiblement oublié par un de ses techniciens : « Parfois je dois faire les choses pour moi-même ! » et de poursuivre en déclarant qu’il est très heureux de retrouver le Trianon, une des salles et un des concerts qu’il a préférées sur sa précédente tournée. Son nouvel album, « Higher Truth » (2015), est plutôt convaincant, même si Chris n’en tirera que 4 extraits ce soir, mais le set débute avec le joli "Before We Disappear" où l’on remarque d’emblée aux côtés de Chris et de sa guitare acoustique la présence du multi-instrumentiste Bryan Gibson, ici aux claviers, mais qui passera également à la mandoline et surtout au violoncelle. On remonte ensuite dans le temps avec un titre issus de son tout premier album solo, « Euphoria Mourning » (1999), le catchy "Can’t Change Me".

Cornell s’avance ensuite en devant de scène, équipé d’un harmonica et veut nous interpréter un titre écrit en 1964, son année de naissance, et qu’il trouve très à propos, bien qu’il en modifie quelques paroles, pour illustrer l’époque actuelle « où quelqu’un comme Donald Trump a une chance de devenir président des Etats-Unis » comme il dit au public, qui lui répond évidemment par de copieuses huées ! C’est ainsi que suit le folk "The Times They Are A Changin’" de Bob Dylan, que les connaisseurs ne manqueront pas d’apprécier, et Cornell de faire des merveilles dans un style où on ne l’imaginait pas forcément. Peut être le meilleur atour de son nouvel album, "Nearly Forgot My Broken Heart" suit avec Gibson qui passe à la mandoline. L’intérêt de voir Cornell en acoustique réside déjà dans le fait de le voir beaucoup plus décontracté et loquace (il n’a de cesse de parler au public et de raconter des histoires en rapport aux chansons) mais surtout de profiter pleinement de sa voix magique, majestueuse et prenante et du timbre légendaire qui va avec, ces dernières n’ayant pas à lutter dans ce contexte contre des têtes d’ampli à lampe poussées dans leur retranchement !

Un peu de respect pour les cordes vocales de nos chanteurs favoris ne fait pas de mal, non vraiment pas ! La soirée est déjà partie sous les meilleurs signes, mais commence à prendre une tournure encore meilleure lorsque Cornell livre tout d’abord un hommage au génial PRINCE, décédé la veille, avec une belle interprétation de "Nothing Compares 2 U" suivi du premier titre de SOUNDGARDEN de la soirée, "Fell On Black Days", évidemment acclamé par le public. Autre moment de grande émotion, lorsque Chris évoque la tragédie des attentats du 13 novembre 2015 et salue la résilience dont la ville de Paris a su faire preuve en réponse, en soulignant l’inspiration que cela a procuré au monde entier. Il nous dédie donc le "Imagine" de qui vous savez, « un homme qui croyait à un monde meilleur mais qui a pourtant été assassiné » comme le dit Cornell. Outre les relectures acoustiques et autres reprises, un des intérêts majeurs des tournées solo de Cornell réside dans l’interprétation de titre de TEMPLE OF THE DOG avec en tête ce soir ce magnifique "Call Me A Dog". Un des titres les plus remaniés ce soir, le "Blow Up The Outside World" de SOUNDGARDEN, agrémenté d’un final psychédélique truffé d’effets (looper, delay, etc.), sans aucun doute le titre le moins acoustique du soir !

"Black Hole Sun" est évidemment acclamé comme le gros classique qu’il est, mais on s’amuse davantage de voir Chris rendre hommage à une autre de ses idoles, en l’occurrence Johnny Cash, en jouant sa version de "Rusty Cage", un titre pourtant écrit par Cornell dans SOUNDGARDEN. Excellente initiative ! Pour chanter "When I’m Down", accompagné par la seule piste piano de la version studio, lue par un 33 tours, il amuse le public en livrant sa petite analyse : « Mon premier album solo a été réédité 18 ans après sa sortie et je vais vous en jouer un de mes titres préférés. Pourquoi les maisons de disque ressortent les albums ? Pour pouvoir vendre ce que je tiens dans ma main, un vinyl ! Ils ont inventé la technologie digitale pour autodétruire leur propre industrie et se remettre à vendre ce qu’ils vendaient il y a déjà 40 ou 50 ans, car heureusement au départ, ils avaient eu la bonne idée ! » 

En quittant la scène, Cornell choisit un bon classique des familles avec le "A Day In The Life" des BEATLES et nous annonce avec le sourire une relative mauvaise nouvelle en rappel : « Il y a couvre-feu ici et je ne pourrai pas jouer autant de titres que d’habitude, la prochaine fois je reviendrai dans une autre salle où je pourrai jouer pour vous pendant 3 ou 4 h ! » Car si nous avons droit à 21 titres, ce qui n’est pas si mal, les autres dates en affichent souvent 26. Toujours est-il que Cornell nous la joue famille, en dédiant tout d’abord le "Like A Stone" d’AUDIOSLAVE à sa belle-mère, s’agissant visiblement de son titre favori, et terminant tout en douceur la soirée par le "Josephine" du nouvel album qu’il aura mis 13 ans à finaliser et qui se voit dédié à sa femme, rencontrée à Paris. Un chouette concert avec une fin visiblement écourtée, mais passé cette petite frustration, les spectateurs du Trianon auront assurément passé un très bon moment !


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Blogger : Laurent Reymond
Au sujet de l'auteur
Laurent Reymond
Passionné de musique (et de basket-ball), j'ai fondé mon webzine Heavy Music en 2004 afin de partager mon avis sur l'actualité musicale, tenter de poser des questions pertinentes à mes musiciens favoris et mettre la lumière sur des formations chères à mes yeux. De 2008 à 2012 j'ai officié au sein de Rock Hard, avant de revenir à Heavy Music cette même année et de participer depuis 2014 à l'aventure Hard Force. Une manière de boucler la boucle pour moi, lecteur assidu de la version papier de Hard Force dans les années 90, mon magazine de chevet pendant l'enfance et l'adolescence. Metal, Hard-rock, Classic-rock, Rock sudiste, Stoner, Doom, Rock Progressif, Blues, Jamband, Funk, Jazz...peu importe, pourvu que la musique soit bonne, organique et personnelle !
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