18 janvier 2019, 18:25

FLOTSAM AND JETSAM

• La chronique du nouvel album par Manard (ULTRA VOMIT)


Malgré ce que pourrait le laisser penser son titre, « The End Of Chaos » ne marque pas la fin du voyage pour FLOTSAM AND JETSAM. Même si les thrashers originaires de l’Arizona n’ont jamais accédé à la première division incarnée par le tout-puissant Big Four (METALLICA, SLAYER, MEGADETH et ANTHRAX pour ceux qui auraient passé les trois dernières décennies sous un caillou) et restent largement sous-estimés, ils ont toujours le regard tourné vers le futur. Et seront d'ailleurs en concert à Paris au Trabendo, le 20 mars prochain, en compagnie d'OVERKILL, DESTRUCTION et MESHIAAK.

Pour chroniquer cette quatorzième réalisation des musiciens qui annonçaient « l’album le plus heavy » de leur carrière, on a demandé à Manard, batteur/chanteur d’ULTRA VOMIT et grand fan de FLOTSAM AND JETSAM devant l’Eternel, de se mettre au clavier. Verdict…

 

Il est quasiment impossible de commencer une chronique d'un album de FLOTSAM & JETSAM sans évoquer sa carrière que certains considèrent comme... maudite ! (Note : demander au webmaster de rajouter une musique flippante à cet endroit). Si le terme “maudite” est un peu exagéré, il est indéniable que le groupe n'a pas eu beaucoup de chance tout au long de ses (bientôt) 35 ans de carrière. Pourtant, celle-ci démarre sur les chapeaux de roues avec leur premier album, « Doomsday For The Deceiver » (à ce propos, il faut écouter la version remixée !). L'album fait du bruit et se tape même un 6/5 dans le magazine Kerrang!, un privilège extrêmement rare !

Et paf, direct, on leur pique leur bassiste (un sombre groupe de metal, j'ai oublié le nom, ça finit pas "Ica" je crois). C'était le début d'une histoire semée d'embûches pour le combo. Cela dit, je ne vais pas vous raconter la totalité des 35 ans de carrière de FLOTSAM, j'en ai un peu marre d'aller sur Wikipédia. Ce qu'il faut retenir, c'est que le groupe est terriblement sous-estimé. Il possède certainement le meilleur chanteur de la scène thrash, Eric A. Knutson, il a pondu des classiques du metal comme « Drift » ou « Cuatro » qui prenaient le même genre de virage qu'un « Youthanasia » de MEGADETH mais qui sont restés dans l'ombre de ce genre de grand groupe justement. Alors bon, sa discographie est loin d'être parfaite, mais force est de constater que des groupes moins brillants s'en sont mieux sortis... C'est le jeu de la vie !

Tout ça nous amène donc à aujourd'hui et à la sortie du petit dernier, « The End of Chaos ». Replaçons les choses dans leur contexte : en 2016, le groupe sort un album nommé sobrement « Flotsam And Jetsam », comme pour signifier un nouveau départ. L'album est bon, voire très bon. Mais il faut transformer l'essai ! Alors, quel est donc le menu de ce nouveau repas metallique ? La métaphore gastronomique n'est pas si anodine car il faut bien avouer que son album éponyme précédent mettait bien en appétit. Avec un retour au thrash des débuts, une énergie retrouvée et une production très moderne, cet album se laissait fondre dans la bouche.

Du coup, mon intérêt envers le groupe (qui s'était étiolé au fil des années, il faut bien l'avouer) était un peu revigoré, et quand est sorti le premier extrait (“Control”), je l’ai écouté d'une oreille attentive. Première surprise avant même l'écoute du morceau : la pochette. Avec le retour du monstre du premier album. Ce clin d'œil à ce qui reste leur album le plus réputé est-il justifié ? Ou bien est-il juste là pour éveiller l'intérêt du fan un peu lassé (comme je pouvais l'être moi-même) ?

Environ 5 minutes plus tard, une oreille en moins, on élimine direct la seconde option : le morceau est du gros thrash qui tache et rappelle effectivement ce qu'ils ont pu faire à leurs débuts. Très prometteur, mais l'album allait-il garder ce seuil de qualité du début à la fin ? Eh bien, la réponse est un grand : « Oui » ! FLOTSAM AND JETSAM reprend à peu près là où il s'était arrêté avec l'opus précédent. Mais continue d'affiner la formule et de peaufiner son style. Là où le précédent pouvait lasser légèrement, cet album est plus varié. « Flotsam And Jetsam » manquait de refrains accrocheurs ? C'est corrigé ici ! On est en plein dans le "pareil mais mieux", et après 35 ans de carrière, c'est assez rare de voir un groupe continuer à faire évoluer son style comme ça (même si on peut aussi parler de retour aux sources, hein).

Mais ce style, parlons-en un peu plus en détail quand même pour ceux qui découvriraient aujourd'hui le groupe. Comme dit précédemment, on navigue dans une mer de thrash, mais teintée d'éléments à la fois old school et modernes. Un groupe aussi expérimenté sait effectivement caser ses influences avec brio et FLOTSAM nous envoie donc des passages entiers empruntés au heavy des années 80 (MAIDEN en tête), très classiques, mais glissés parmi des morceaux bien énervés. Ça fait mouche comme peut en témoigner le morceau “Recover”.

Mais pas question de regarder uniquement dans le rétro et FLOTSAM nous prouve qu'il est aussi un contemporain, à commencer par la production de l'album qui est excellente, très moderne. Mais aussi dans certains passages un peu moins "évidents" comme les couplets de “Recover” et ses syncopes bien senties. Rassurez-vous, on reste dans un schéma thrash metal cependant, et sur ce plan, « The End of Chaos » est de haute volée. Des riffs assassins en veux-tu en voilà (au hasard "The End" ou "Prepare for Chaos"), des mosh-parts (toujours "Prepare for Chaos"), bref, le programme est respecté à la lettre. Chaque morceau est travaillé, aucun remplissage n'est à déplorer, ce qui est assez rare pour un album composé de 12 titres. Le tout passe comme une lettre à la poste !

A tout ceci, il faut ajouter la "petite" valeur ajoutée du groupe, j'ai nommé Eric A. Knutson, le chanteur emblématique du navire échoué (ouais, FLOTSAM AND JETSAM, ça veut en gros dire “épave”) ! Comme d'habitude, le sieur nous livre une prestation exceptionnelle. Après 35 ans de carrière, c'est encore plus bluffant. Son chant oscille entre voix claires limpides et chant plus saturé qui pourrait le rapprocher d'un Matthew Barlow (ex-ICED EARTH), voire d'un Hansi Kürsch (BLIND GUARDIAN). Ceux qui sont allergiques au chant trop lyrique peuvent donc potentiellement apprécier, l'agressivité est bien présente. Sans contestation possible, Eric A. K. est bien l’un des points forts du groupe.

Mais saluons aussi ses acolytes. En premier lieu, Michael Gilbert à la guitare depuis les débuts, qui délivre des riffs bien sentis et garde la flamme lui aussi depuis quasiment 35 ans (avec une pause de quelques années, il est vrai). Mention spéciale également à Ken Mary, un vieux briscard qui a joué notamment avec Alice Cooper, qui nous fait une véritable démonstration de batterie, servie en plus par un son absolument parfait. Très bonne pioche ! On n'oublie pas les autres non plus, car chacun remplit son rôle à la perfection.

Bref, un album parfait ? On n'en est pas loin, en tout cas, FLOTSAM & JETSAM revient encore plus fort que sur son album précédent et montre un groupe quasiment en pleine renaissance après 35 ans de carrière dans l'ombre. Et d'ailleurs, il serait temps de les faire sortir de cette ombre car « The End of Chaos » est tout simplement leur meilleur album thrash depuis « Doomsday for the Deceiver », sorti en 1986 !

Si vous aimez ce style, teinté de mélodie (à l'instar des derniers KREATOR par exemple), n'hésitez pas : foncez !


Blogger : Laurence Faure
Au sujet de l'auteur
Laurence Faure
Le hard rock, Laurence est tombée dedans il y a déjà pas mal d'années. Mais partant du principe que «Si c'est trop fort, c'est que t'es trop vieux» et qu'elle écoute toujours la musique sur 11, elle pense être la preuve vivante que le metal à haute dose est une véritable fontaine de jouvence. Ou alors elle est sourde, mais laissez-la rêver… Après avoir “religieusement” lu la presse française de la grande époque, Laurence rejoint Hard Rock Magazine en tant que journaliste et secrétaire de rédaction, avant d'en devenir brièvement rédac' chef. Débarquée et résolue à changer de milieu, LF œuvre désormais dans la presse spécialisée (sports mécaniques), mais comme il n'y a vraiment que le metal qui fait battre son petit cœur, quand HARD FORCE lui a proposé de rejoindre le team fin 2013, elle est arrivée “fast as a shark”.
Ses autres publications
Cookies et autres traceurs

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l’utilisation de Cookies ou autres traceurs pour mémoriser vos recherches ou pour réaliser des statistiques de visites.
En savoir plus sur les cookies : mentions légales

OK