15 mai 2020, 18:30

OPETH

• "Orchid" (1995 - Retro-Chronique)

Blogger : Clément
par Clément
Album : Orchid

L’aventure OPETH, c’est avant tout une histoire commune entre deux amis de longue date : Mikael Åkerfeldt, préposé aux guitares et Anders Nordin, batteur et claviériste de son état. Les deux larrons forment ERUPTION en 1987 à Sörskogen, dans la banlieue de Stockholm et fourbissent leurs armes au son d’un death/thrash de facture classique qui ne laissera à la postérité qu’une poignée de cassettes issues de sessions de répétition. Rien de bien transcendant donc, mais il s’agit bien là d’une première étape essentielle puisqu’elle est en quelque sorte à l’origine de la création d’OPETH trois ans plus tard lorsque ERUPTION rend les armes. C’est en effet un certain David Isberg qui se rapproche de Mikael Åkerfeldt pour lui proposer d’embarquer à bord d’un OPETH encore tout frais, ce qu’il accepte sans réserve entraînant dans son sillage Anders Nordin quelques mois plus tard. Baignant alors dans un death metal tout ce qu’il y a de plus suédois, le groupe évolue progressivement vers quelque chose de plus sombre et mélodique que ses petits camarades. Le trio agrandit un peu plus tard ses rangs pour y intégrer notamment Johan De Farfalla à la basse et Peter Lindgren aux guitares ainsi qu’une flopée d’autres musiciens qui n’y feront qu’un passage éclair.

Depuis ses tout premiers débuts, OPETH a toujours été en marge d’une quelconque scène pour définir les contours d’un style unique : le sien. « Orchid », premier album du clan, en est la plus belle illustration, ouvrant le bal d’une trilogie influencée par le death metal qui prendra fin trois ans plus tard avec la sortie du grandiose « My Arms, Your Hearse ». La suite est connue de tous avec « Blackwater Park » qui demeure encore aujourd’hui l’album d’une décennie, installant le groupe au panthéon des plus grands pendant que « Ghost Reveries » et « Watershed » ouvrent quelques années plus tard ses perspectives musicales sur d’autres univers plus progressifs. Viennent ensuite « Heritage » et ses successeurs marquant chacun une rupture avec le style du groupe puisqu'ils résonnent comme autant de vibrants hommages aux racines du rock prog’ des années 70. Voilà pour le rapide tour d’horizon dans la discographie touffue d’OPETH qui compte pas moins de treize albums, quelques live et singles, où chacun trouva forcément son bonheur dans ces presque trois décennies d’amour du metal sous toutes ses formes.

Ce premier album marque donc les débuts discographiques du groupe et pour un premier jet, celui-ci fait très fort ! Une signature chez Candlelight, label qui compte alors dans ses rangs EMPEROR, ENSLAVED et SOLSTICE, un enregistrement dans les forges de l’Unisound par le grand Manitou Dan Swanö et un mastering réalisé par Peter In De Betou (également à la manœuvre chez ARCH ENEMY, AMON AMARTH et DIMMU BORGIR). Oui, il y a pire pour se lancer dans le grand bain bouillonnant du metal. Tout cela est complété par des photos raffinées de Torbjörn Ekebacke, résolument à contre-courant de ce qui se fait à l’époque en matière de visuels pour du metal extrême. A l’image de cette fleur délicate, une orchidée bien sûr, qui orne la pochette de l’album, « Orchid » reprend les codes du death metal pour leur insuffler une dose de mélodies inhabituelles pour l’époque. Les bases de son style sont en rodage, certes, et demandent à être peaufinées mais c’est à coup sûr ce côté brut, rugueux aussi bien dans la production que dans cette section rythmique impétueuse qui lui confèrent tout son charme. Tout du long des soixante-cinq minutes, ici les riffs tournoient et une épaisse brume nordique s’installe dans les enceintes. La mélancolie pointe le bout de son nez, prenant définitivement ses marques sur un "In Mist She Was Standing » au format XL qui fait monter la pression avec un doigté digne des plus grands. Cette mélancolie, sourde et amère, résonne ici avec une justesse, une force qui constituent la marque du fabrique du groupe. "Under The Weeping Moon" et "Forest Of October" prennent ensuite le relai pour estourbir le moindre sursaut de sérénité à grands coups de riffs épiques à souhait. Un tantinet plus musclé que ses petits camarades, "The Twilight Is My Robe" reprend quant à lui ces mélodies somptueuses avec son final bardé de tremolos à couper le souffle. Toutes tripes dehors, chacun des musiciens livre ici une partition poignante qui ne baisse jamais la garde et dont "The Apostle In Triumph" et ses treize minutes envoûtantes demeure à jamais le point culminant. Ce morceau représente à lui seul ce qu’OPETH sait faire de mieux : l’alternance de parties calmes, introspectives, couplées à de sublimes cavalcades rythmiques empreintes d’une profonde émotion, le tout encore une fois sublimé par les growls rageurs et désespérées du sieur Åkerfeldt.

Aux côtés du « Brave Murder Day » de KATATONIA, sorti un an plus tard chez Avantgarde Music, et du méconnu « Rain Without End » de son frère jumeau OCTOBER TIDE, cet album d’OPETH est un pur joyau dans un style où bien peu de ses pairs ont su tirer leur épingle du jeu. Ce death metal sombre, profondément mélancolique, aux mélodies sublimes qui arracheraient une larmichette aux plus durs d’entre nous n’a connu que bien peu d’équivalent depuis. Il s’est d’ailleurs évanoui à la fin des années 90 en même temps qu’une époque particulière qui a vu exploser le black metal et disparaître ce bon vieux death metal... qui n’avait pas encore dit son dernier mot !


Blogger : Clément
Au sujet de l'auteur
Clément
Clément a connu sa révélation métallique lors d'un voyage de classe en Allemagne, quelque part en 1992, avec un magazine HARD FORCE dans une main et son walkman hurlant "Fear of the Dark" dans l'autre. Depuis, pas une journée ne se passe sans qu'une guitare plus ou moins saturée ne vienne réjouir ses esgourdes ! Etant par ailleurs peu doué pour la maîtrise d'un instrument, c'est vers l'écriture qu'il s'est tourné un peu plus tard en créant avec deux compères un premier fanzine, "Depths of Decadence" et ensuite en collaborant pendant une dizaine d'années à Decibels Storm, puis VS-Webzine. Depuis 2016, c'est sur HARD FORCE qu'il "sévit" où il brise les oreilles de la rédaction avec la rubrique "Labels et les Bêtes"... entre autres !
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