18 juin 2023, 23:55

PANTERA

@ Clisson (Hellfest Open Air)


Phil Anselmo peut quasiment être considéré comme un pilier du Hellfest, du moins dans sa programmation, ayant été à l’affiche de plusieurs éditions avec les multiples formations dont il fait ou a fait partie et est même venu exclusivement en villégiature dans l’intervalle, déambulant au gré de ses envies sur le site ou backstage, verre(s) à la main et spliff(s) au bec, prenant la pose selfie avec tout le monde et taillant le bout de gras comme si chacun était de vieux potes. Mais il n’est jamais venu avec LE groupe auquel il a prêté sa voix entre 1988 et 2000 sur six albums ayant quasiment tous eu valeur de référence. Bien sûr, cette apparition au Hellfest n’aurait jamais été possible il y a quelques années, principalement de par le tragique décès du guitariste Darrell Lance Abbott survenu le 8 décembre 2004 et que l’on surnommait Diamond ou encore Dimebag (que l’on peut traduire par petit pochon) pour la propension qu’il avait à fumer d’énormes quantités de marijuana. Le split officiel en novembre 2003 avait été précédé d’une brouille du batteur Vinnie Paul Abbott et son refus de fouler à nouveau la scène sans son frère et en compagnie d’Anselmo était alors sans appel. Ce, jusqu’à sa disparition soudaine le 22 juin 2018, terrassé par une crise cardiaque, un événement qui avait d’ailleurs été relayé sur les écrans du Hellfest au petit matin du 23, ternissant la fête et ayant vue de nombreuses formations lui rendre hommage tout au long des deux journées qui ont suivies.

Depuis, et même avant comme dit ci-dessus, l’évocation d’une "reformation" de PANTERA avait été relayée par différents médias et personnalités, chacun y allant de son savoir ou indiscrétion. Vinnie y était resté farouchement opposé (il n’a jamais reparlé à Phil Anselmo jusqu’à sa mort) mais la donne a, forcément, changé avec sa disparition. Mais qui pouvait alors enfiler les Converse de Dimebag et les gants de Vinnie ? A ce petit jeu du "Qui est-ce ?", il n’y avait pas trente-six possibilités et très vite sont apparus sur les radars les noms de Zakk Wylde, guitariste d’Ozzy Osbourne mais aussi à la barre de son propre navire BLACK LABEL SOCIETY et celui du batteur Charlie Benante, à la forge chez ANTHRAX. Et, en effet, lorsque fut officialisée une tournée-hommage aux frères Abbott et à la légende PANTERA, ce line-up a été confirmé. Au passage pour cette prestation au Hellfest, une mention spéciale niveau vestimentaire pour le t-shirt de Benante où l’on pouvait apercevoir les frangins Abbott en version Simpson ainsi que pour la veste de Zakk Wylde où sont cousus sur le devant deux grands patchs de part et d’autre portant pour inscriptions "St. Vinnie" et "St. Dime".


Il ne fallait donc pas être devin pour se douter que PANTERA serait à l’affiche de l’édition 2023 du Hellfest, d’une part parce que Phil est un petit peu chez lui à Clisson on l’a dit et, plus certainement, parce que le groupe avait prévu de donner un nombre restreint de dates et qu’il a choisi de privilégier les festivals en Europe. Précédés d’une émouvante intro sur écran montrant principalement les exploits backstage de Dimebag (et Vinnie dans une moindre mesure), le tout sur fond sonore de "Regular People (Conceit)", c’est devant une foule particulièrement remontée à bloc que les quat’ z’amis investissent la Mainstage 02 à 21h en cette dernière journée de festivités au son du massif "A New Level", premier des cinq extraits de l’album-coup de poing « Vulgar Display Of Power » que l’on entendra ce soir.

La saillie de certains "fans" vers les premiers rangs s’apparente à une percée des lignes ennemies en temps de guerre. Il est d’ailleurs quelque peu dommage de voir que certains sont là pour jouer des coudes (euphémisme...) plutôt que pour profiter d’un concert encore inespéré il y a quelques années et que beaucoup de ces mêmes personnes n’avaient pas vu le groupe à l’époque de sa dernière venue en France. Mais c’est un autre débat. Excusez-moi donc de la jouer rabat-joie mais ce concert aurait dû être écouté quasi-religieusement. Amen.


Le répertoire du groupe étant principalement constitué de mandales comparables à celle de la pochette de l’album susmentionné, c’est donc à une véritable dérouillée musicale à laquelle nous avons droit, une fessée déculottée sans autre forme de procès. Mention aux ultra-violentes "Strength Beyond Strength" et "Suicide Note Pt. II". Détailler titre par titre cette éreintante prestation (pour le public s’entend) ne servira pas à grand-chose mais on relèvera tout de même au passage la "moins connue", telle que Phil Anselmo la décrit, "Yesterday Don’t Mean Shit" tirée de l’album « Reinventing The Steel », aux paroles lourdes de sens dans le contexte qui cerne sa tournée et qui se veut, autant une mise au poing (oui oui, on va l’écrire ainsi pour la référence) envers le public en général qu’un gros majeur dressé à l’égard de tous les détracteurs de cette reformation-tournée-hommage.

D’la patate de forain à tout va on vous dit. Pour le reste, entendre scander le refrain de "Walk" est tout bonnement jouissif, à l’instar du refrain et des hurlements finaux sur "Fucking Hostile". Et que dire du final sur "Cowboys From Hell" ? Anthologique, définitif, une profession de foi et un rappel à l’Histoire du metal. Et s’il est bon de voir le dégingandé bassiste Rex Brown arpenter la scène avec sa Gibson Thunderbird, les regards sont attirés par Zakk Wylde, tronçonnant à tout va ainsi que sur le massif chanteur, un poil nonchalant (marijuana, es-tu là ?) et mâchouillant son chewing-gum, cela ne l’empêchant pas d’être appliqué, parfois sincèrement ému et faisant montre d’un coffre conséquent pour entonner les hymnes que l’on connait. Et force est de reconnaître que ça ne boxe pas dans la même catégorie que des Vince Neil ou Axl Rose. Charlie Benante lui, taquine la double avec application et c'est une vraie prouesse de le voir sur scène, ne l'étant pas si souvent que cela avec ANTHRAX, en raison de problèmes médicaux.


Abordons enfin rapidement le sujet qui fâche (pas chez HARD FORCE en tout cas) car oui, nous sommes bien d’accord que les quatre protagonistes réunis ne sont pas des philanthropes (quoiqu’avec le prénom d’Anselmo, on puisse douter...) et prennent les brouzoufs qu’il y a à prendre. Mais juste pour savoir, vous travaillez gratuitement, vous ? On est d’accord... Et en parlant de bosser, il semblerait que la bande prévoit des heures supplémentaires car Phil demandera à un moment si certains répondraient présents s’ils revenaient ultérieurement et ailleurs.

La réaction est unanime et positive et il faut donc s’attendre à une vraie tournée des salles en bonne et due forme dans un avenir proche. Grand bien leur prenne ! Pour les absents du Hellfest, ce sera l’occasion de rattraper cela et pour les autres, de prendre un peu de rab. Remarquez, avec seulement 1h15 de temps de jeu, on aurait bien pris une ou deux claques de plus, le répertoire de PANTERA ne manquant pas de possibilités d’en distribuer. Au hasard, "Primal Concrete Sledge", "Heresy", "Slaughtered" ou une "Goddamn Electric" sur laquelle Kerry King (SLAYER) était venu taper le solo sur album. En cela, on peut dire qu’il manquait un petit quelque chose pour que le plaisir soit total et que l’on n’en sorte pas un peu frustrés. Tout cela pour vous dire que l’on peut légitimement conclure ce reportage par le slogan de la publicité pour les Finger de Cadburry, « C’est tellement bon que c’est trop court ! »

Photos © Leonor Ananké - Portfolio

Set-list :
A New Level
Mouth For War
Strength Beyond Strength
Becoming
I'm Broken
Suicide Note Pt. II
5 Minutes Alone
This Love
Yesterday Don't Mean Shit
Fucking Hostile
Walk
Domination / Hollow
Cowboys From Hell

Blogger : Jérôme Sérignac
Au sujet de l'auteur
Jérôme Sérignac
D’IRON MAIDEN (Up The Irons!) à CARCASS, de KING’S X à SLAYER, de LIVING COLOUR à MAYHEM, c’est simple, il n’est pas une chapelle du metal qu'il ne visite, sans compter sur son amour immodéré pour la musique au sens le plus large possible, englobant à 360° la (quasi) totalité des styles existants. Ainsi, il n’est pas rare qu’il pose aussi sur sa platine un disque de THE DOORS, d' ISRAEL VIBRATION, de NTM, de James BROWN, un vieux Jean-Michel JARRE, Elvis PRESLEY, THE EASYBEATS, les SEX PISTOLS, Hubert-Félix THIÉFAINE ou SUPERTRAMP, de WAGNER avec tous les groupes metal susnommés et ce, de la façon la plus aléatoire possible. Il rejoint l’équipe en février 2016, ce qui lui a permis depuis de coucher par écrit ses impressions, son ressenti, bref d’exprimer tout le bien (ou le mal parfois) qu’il éprouve au fil des écoutes d'albums et des concerts qu’il chronique pour HARD FORCE.
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