13 juin 2023, 23:59

ARCH ENEMY + AD INFINITUM + HALIPHRON

@ Lille (Le Splendid)

Avant l’ouverture des portes du Splendid, la file s’étend, sous un soleil agressif, sur une longueur impressionnante. Le concert d’ARCH ENEMY dans l’ancien cinéma lillois affiche complet. Un groupe de haut niveau, une chanteuse charismatique et un dernier album « Deceivers » de qualité, tels sont les ingrédients pour remplir une salle de 900 personnes.

Alors que la queue pour s’acheter une boisson à l’unique bar décourage même les soiffards les plus endurcis, HALIPHRON lance les hostilités avec un black/death symphonique, souvent mid-tempo, efficace à défaut d’être transcendant ; on pense souvent, très souvent, trop souvent à CRADLE OF FILTH et DIMMU BORGIR. Les Bataves, emmenés par leur sculpturale chanteuse au talent indéniable, sont ravis d’être sur scène et entraînent le public, d’abord circonspect puis séduit. Ils défendent leur tout frais – et c’est bien la seule chose de fraîche dans cette soirée brûlante, nous y reviendrons – premier album, « Prey », sorti fin mars 2023.

L’énergie communicative des musiciens compense des compositions pas toujours originales à l’image de "Human Inferno". Les claviers majestueux, ou pompeux si vous n’êtes pas fans de ce type d’orchestration, sont omniprésents pour créer les ambiances vaguement inquiétantes d’un gothique bon marché. Une intro et cinq morceaux en une demi-heure et les Néerlandais s’en vont... sans laisser un souvenir impérissable, si ce n’est la chanson "Prey", entre mélancolie et colère.


Melissa Bonny, qui oscille entre douceur pop et agressivité metal, chant clair et growls, est l’atout maître des Suisses AD INFINITUM. Ils proposent un metal symphonique porté par des refrains accrocheur, tel "Unstoppable", et aux thèmes basés sur l’histoire. Leurs morceaux courts et parfois dansants, comme "Eternal Rains" qui ouvre le feu ou un "Upside Down" guère inspiré, sont calibrés, comme si le groupe s’efforçait de suivre un cahier des charges. Les musiciens, qui semblent parfois sur la retenue lors des passages les plus mélodiques, se lâchent quand les guitares se font heavy sur "Your Enemy" ou "Into The Night". Il est dommage qu’à l’exception de "Seth", les Helvètes n’aient pas axé leur demi-heure sur les arrangements orientaux qui parsèment leur dernier album « Chapter III - Downfall » consacré à l’Egypte de Cléopâtre.


Cette prestation achevée, une partie des spectateurs quittent les lieux... N’aimeraient-ils pas ARCH ENEMY ? Non, non, ils fuient la chaleur infernale qui pèse sur le Splendid, les murs qui suintent d’une humidité quasi-tropicale avant de revenir dès que résonne le "Aces Of Spade" introductif, dès que les premiers jets de fumée grimpent vers le plafond.. La bande à Amott, tout de noir vêtue avec une Alissa en cuir bleuté ultra moulant, livre un concert carré, d’une grande précision, porté par un son d’excellente qualité et une set-list bien pensée. Chauffés à blanc par la chanteuse, qui utilise le français pour toutes ses interventions, les fans en sueur se régalent dans une fosse devenue un four dominé par 12 amplis Marshall. A la différence d’autres formations à frontwoman, la vocaliste n’est pas la seule à capter la lumière : chaque musicien a droit à son moment de gloire, à la mise en avant de ses capacités techniques... et c’est la moindre des choses tant ils sont doués.

Le dernier album « Deceivers » est mis à l’honneur avec six chansons, dont la virulente "Deceiver, Deceiver" brûlot inaugural intelligemment suivi du plus mélodique "The World Is Yours" tiré, comme son frère "The Eagle Flies Alone", du décrié « Will To Power ». Les compositions récentes donnent au concert une coloration heavy 80’s. "Handshake With Devil" évoque JUDAS PRIEST si Rob Halford muait pour growler quand "In The Eye Of The Storm" lorgne sur la lourdeur de BLACK SABBATH, période Tony Martin. Heavy aussi, ce "Sunset Of Empire" taillé pour le live et entêtant ce "House Of Mirrors" doté d’un riff insidieux.

ARCH ENEMY, même si plus de la moitié de la prestation (10 titres sur 18) est consacrée à l’ère White-Gluz, ne néglige pas ses classiques, ses irrésistibles bombes melodeath. Après l’incontournable "We Will Rise", le rappel est une plongée dans la décennie 1996-2005 : trois titres de « Wages Of Sin » se succèdent ("Ennemy Within" où Erlandsson s’illustre derrière sa batterie, le nom moins violent "Burning Angel" et le dispensable "Snow Bound") avant les monstrueux "Nemesis" et "Fields Of Desolation". Cette paire de "aces of spade" finale, diabolique alliage de puissance, de vitesse et de mélodies, de soli limpides et de riffs ravageurs, brille d’une dernière flamme, ultime coup de soleil d’une heure trente caniculaire. « That was the hottest one of the year so far », pouvait écrire sans mentir le groupe sur sa page Facebook à propos de ce chaud show lillois.

Photos © Sébastien Feutry - Portfolio : AD INFINITUM - HALIPHRON
 

Blogger : Christophe Grès
Au sujet de l'auteur
Christophe Grès
Christophe a plongé dans l’univers du hard rock et du metal à la fin de l’adolescence, au tout début des années 90, avec Guns N’ Roses, Iron Maiden – des heures passées à écouter "Live after Death", les yeux plongés dans la mythique illustration du disque ! – et Motörhead. Très vite, cette musique devient une passion de plus en plus envahissante… Une multitude de nouveaux groupes a envahi sa vie, d’Obituary à Dark Throne en passant par Loudblast, Immortal, Paradise Lost... Les Grands Anciens – Black Sabbath, Led Zep, Deep Purple… – sont devenus ses références, comme de sages grands-pères, quand de jeunes furieux sont devenus les rejetons turbulents de la famille. Adorant écrire, il a créé et mené le fanzine A Rebours durant quelques années. Collectionneur dans l’âme, il accumule les set-lists, les vinyles, les CDs, les flyers… au grand désarroi de sa compagne, rétive à l’art métallique.
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