A peine deux ans après la sortie de leur dernier album en date, « Adumbration Of The Veiled Logos », revoilà déjà les Néo-Zélandais VERBERIS pointer le bout de leur fourche pointue avec « The Apophatic Wilderness ». Oeuvrant toujours au sein de cette mouvance dite "black orthodoxe" sublimée en son temps par FUNERAL MIST, DEATHSPELL OMEGA ou ONDSKAPT, le groupe ne se fait pas prier pour envoyer quatre longs morceaux qui viennent illustrer cette notion de "Apophatique" qui résonne ici comme une évidence.
Si je me réfère à la définition de ce mot peu commun, il s’agit de « Ce que se dit d'une théologie qui approche de la connaissance de Dieu en partant de ce qu'il n'est pas, plutôt que de ce qu'il est ». Nous sommes donc les deux pieds dans un concept bel et bien en lien avec le style pratiqué. Un style qui a déjà connu son lot de formations plus ou moins habiles à faire ressortir cette noirceur et ce mysticisme que nous sommes en droit d’attendre de sa part. Une discipline exigeante, pas que d’un seul point de vue technique, qui impose à la fois une rigueur sans faille dans son exécution et un soupçon d'audace pour piéger l'auditeur dans sa diabolique entreprise. Beaucoup d’appelés, peu d’élus.
Il ne faut d'ailleurs pas moins de cinq minutes avant que les choses ne démarrent véritablement sur "The Emptying Of God" et que le climax voulu par VERBERIS ne se mette bien en place. Avant de laisser place à un maelström de trémolos et de dissonances du meilleur effet soutenu par des parties de batteries pantagruéliques, une nouvelle fois exécutées par le maître Jamie Saint Merat. Le batteur d’ULCERATE signe comme à son habitude une partition d’une très grande finesse, une main de fer dans un gant de velours.
Les nombreux breaks envoyés par le guitariste David Swales ne sont pas en reste, ne relâchant jamais la pression sur l'auditeur. Intenses et sauvages, les guitares tournoient, la basse montre les crocs, sans jamais baisser la garde pendant que le chanteur NH se charge, lui, d’annihiler toute forme de résistance avec ses vocalises d’outre-tombe.
Mais la véritable prouesse de cette ode au côté obscur de la force est de rendre tout cela complètement intelligible, presque naturel. Prenez par exemple le doublé final "Arteries Unto Ruin 1 & 2", qui devrait servir d'examen d'entrée au bac orthodoxe tant ses structures et sa progression sont d'une logique imparable. Celui-ci commence d'abord avec une mouture mid-tempo bien compacte qui se mue abruptement en une embardée rythmique de toute beauté. Les riff tournoyants venant percuter de plein fouet des plans de batterie sauvages et maîtrisés. Un véritable brise-glace qui amorce un changement de bord improbable avec une mélodie en trémolos qui jaillit en milieu de parcours, subtile et effrayante, entraînant ainsi l'auditeur toujours plus loin dans l'obscurité. Avant de repartir toutes griffes dehors pour un finish épique de toute beauté.
Doté d'une production dense et peaufinée dans la moindre de ses tournures réalisée conjointement par Magnus Lindberg (CULT OF LUNA) et Richard Behrens au mixage, ainsi que d'un artwork énigmatique signé Ars Alchymiae Graphics, ce « The Apophatic Wilderness » est une sombre révélation. De celles qui réclament de nombreuses écoutes attentives et prolongées pour en saisir toutes les subtilités...