18 avril 2024, 20:33

SIDILARSEN

"Que la Lumière Soit"

Album : Que la Lumière Soit

Ici radio Toulouse, des humains parlent aux humains. SIDILARSEN nous propose son « Que la Lumière Soit », son huitième album. Le précédent, « On va tous Crever » a été pendant ces cinq dernières années une tuerie musicale nihiliste qui pour beaucoup fut également un compagnon de route dans un monde divisé par les gilets de Lagarsfeld, un covidalypse, des guerres à vendre, mais aussi des luttes pour la survie mentale de chacun face aux défaitistes de tous poils. Le groupe au tire-bouchon, qui en fait des litres contre une élite a-t ’il mieux à nous lâcher qu’une excellente musique pour l’apéritif ?

Première salve. "Adelphité", ou comment expliciter la volonté de communauté égalitaire des sexes (ni fraternité ni sororité) sur une introduction rythmique martiale. Le duo de voix de David et Ben est en osmose sur ce morceau, les guitares claquent sur un délicieux nuage électro. Une dépêche nullement démodée, un écho du meilleur de chaque monde. "Intox" est plus rentre-dedans, retour à du SIDILARSEN qui tonne de colère et de révolte. Les riffs jaillissent des creusets embrasés par la rage, le metal est sculpté dans des Forges teutonnitruantes. On charge les complotistes et les réacs avec des voix guerrières. RAMMSTEIN approuvera ce groove indus.

SIDILARSEN est également ce porte-étendard musical, qui avec "On Revient sur Terre" prend le temps d’installer l’ampleur de son atmosphère. Et quelle ambiance, lente et parsemée de sursauts lourds et puissants. Les voix ouvrent la voie à la résilience, unique solution à la morosité actuelle délivrée par les bien-pensants. Le slam de nos deux conteurs-compteurs défile et se dévide inexorablement tel le rouet des moires, déesses du destin. Un écho qui rappelle furieusement le diptyque de MASS HYSTERIA sorti il y a quelques mois. Aujourd’hui les groupes de metal ne sont pas que contestation, ils sont acteurs-influenceurs d’un monde meilleur. Ils sont "Sunburn", une chaleur bienveillante pour toutes les voix silencieuses, les ignorés du système.

"Du Sang sur les Fleurs", retour à un metal industriel sans concession, où seules les voix contiennent des bribes de baume au cœur. Normal, une nouvelle fois il s’agit de dénoncer la politique du chaos, celle qui vise à éteindre tout espoir dans le cœur des hommes. Expression sonore de la rage universelle. Un étrange "Luminaria" s’interpose soudain, voix enregistrées de jeunes bébés, leurs babillements chargés de tout l’émerveillement de l’innocence. Cela je comprends. Plusieurs membres de SIDI, comme votre serviteur, ont découvert les joies et les craintes de la paternité en ces années 2.0, ou comment notre individualité devient responsabilité et rêve d’un monde meilleur. Retour à la charge militante avec "Miroir Océan", aux riffs lourds et énervés, aux voix posées et à la batterie déchaînée. Et toujours ces breaks, propices à l’oxygénation, à l’inspiration spirituelle...

Le voyage musical se poursuit. "Amour en Acier" pour affirmer à quel point SIDILARSEN est soudé et propose d’offrir sa résilience à quiconque en voudra. Un chant metal du fond des âges, une remontada, qui au-delà de sa fusion lourde libère un background synthé et des chœurs qui résonnent tel un évangile pour ces bêtes de Cène. Exemplaire. "Immuable" est donc leur volonté, après plus de 25 ans, de poursuivre leur démarche d’aider à libérer nos âmes des ténèbres. "Les Enfants de la Rage", qui fracassent les nuques sur les dancefloor, à grands coups de batterie martelée et de riffs thrash, sont autant nos toulousains que nous, ce public qui le soutient autant qu’eux nous soutiennent. Un gang, une familia qui veut construire son propre monde en toute libertitude.

Dernière ruée. "V(e)mpire", toujours dans l'énervé, on trotte sur des trottoirs mouillés d’amertume, les cris ouvrent les cieux de la revendication, l’envie de vivre. J’avais ironisé jadis sur la rage de jouir, autant que de jouer, des SIDILARSEN, cet extrait l'explicite pour notre plus grand bonheur. "Inanité", un au-revoir avec des poings serrés sur des riffs huileux et des voix incontournables. Un hymne de plus sur un album qui en contient déjà tant. La rage des instruments explicitant la volonté d’amour dans un monde trop souvent avare de ce sentiment. On ne peut que saluer la générosité d’un groupe pour son public.

Ma fille me demande souvent pourquoi j’aime ce groupe d’allumés de Toulouse ? Je lui ai susurré que l’illustre Bernard aurait dit que c’est un groupe pivot de la scène metal française, car à chaque album, à chaque titre, riff ou parole... il nous apostrophe. Je crois que dans cette phrase tout est dit.

Donc nous avons là bien plus qu’un album apéro. Brillance des mots, éclats des riffs. Alors que 2024 soit l’année de la reconnaissance pour SIDILARSEN, et... « Que la Lumière Soit ». Amen.

Blogger : Christophe Scottez
Au sujet de l'auteur
Christophe Scottez
Chris est ethnologue à ses heures perdues, vétéran des pogo joyeux en maillots de core. Un explorateur curieux, grand amateur de riffs et de chants sauvages. Il a grandi dans les glorieuses années 80, bercé par les morceaux canoniques d’ACCEPT, SCORPIONS, MOTLEY CRUE et autres GUNS N ROSES. Traumatisé par le divorce entre Max Cavalera et son groupe, ainsi que par un album des Mets un peu «chargé» en n’importe quoi, Chris a tourné 10 ans le dos au hard rock. Puis, un jour, il a par hasard découvert qu’une multitude de nouveaux groupes avait envahi la scène … ces nouveaux sauvages offraient des sons intéressants, chargés en énergie. Désireux de partager l’émo-tion de ce style de metal sans la prétention à s’ériger en gardien d’un quelconque dogme, il aime à parler de styles de metal dit classiques, mais aussi de metalcore et de néo-metal. Des styles souvent décriés pour leurs looks de minets, alors que l’importance d’un album est d’abord le plaisir sonore que l’on peut en tirer, la différence est la richesse du goût. Mais surtout, peut-on se moquer de rebelles coquets alors que les pères fondateurs du metal enfilaient des leggins rose bonbon et pouponnaient leurs choucroutes peroxydées ?
Ses autres publications
Cookies et autres traceurs

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l’utilisation de Cookies ou autres traceurs pour mémoriser vos recherches ou pour réaliser des statistiques de visites.
En savoir plus sur les cookies : mentions légales

OK