4 mai 2019, 9:52

IRON MAIDEN

• Please Professor Maiden, teach me! (Part 16)


Si nombre de formations (la plupart même) inventent leurs textes de toutes pièces, IRON MAIDEN a depuis le départ choisi la littérature, le cinéma ou encore l’Histoire comme points d’ancrage des paroles de la plupart de ses chansons. C’est ce postulat qui fait qu’aujourd’hui, vous allez pouvoir combler éventuellement quelques lacunes et, comme cela a été le cas pour moi, apprendre quelques "trucs" qui vous feront à coup sûr briller en société ! Un album à la fois, dans l’ordre chronologique de leur sortie dans la discographie du groupe.

Encore un grand merci à Laurence Faure et l’aide précieuse qu’elle m’a apportée à l’élaboration des articles de cette série au long cours.


« The Book Of Souls » (2015)

Enregistré en France comme « Brave New World » dans les studios Guillaume Tell situés à Suresnes, « The Book Of Souls » (« Le Livre des âmes » en VF) est un disque à part dans la carrière d’IRON MAIDEN. D’une part car c’est leur premier double album (triple même dans sa version vinyle) et d’autre part car ses parties vocales ont été enregistrées alors que Bruce Dickinson ne savait pas encore qu’il souffrait d’un cancer de la gorge. Ce fut lors des toutes dernières prises qu’il consulta un spécialiste à Paris et découvrit le mal dont il était atteint. Difficile à croire tant il délivre une prestation encore une fois hallucinante, chanteur hors pair et inégalable qu’il est. La sortie de l’album fut repoussée, le temps pour Bruce de suivre un traitement qui l’a vu être en rémission totale courant 2015, après de longs mois à se battre corps et… âme. Et en 2016, enfin remis sur pied, il reprit la route en compagnie de ses cinq acolytes, s’arrêtant dans notre pays le 10 juin pour la première édition de l’édition française du Download Festival.

Pour ce qui est de son contenu, son contenant même au vu des illustrations des pochettes extérieures et intérieures, tout comme pour le thème de la tournée qui s’ensuivit, IRON MAIDEN a jeté son dévolu sur la culture et la civilisation Maya (mais non, pas l’abeille bande de zouaves !). Pour tenter d’en expliquer les raisons, il faut remonter au 21 février 2008, lorsque que le groupe presque au complet et alors en pleine tournée, se rend au Mexique, et plus précisément à Teotihuacan, pour visiter la Pyramide du Soleil. Il est aisé d’imaginer que l’inspiration pour ce futur album a vu le jour lors de cette visite.
 


 


Les Mayas sont une ancienne civilisation de Mésoamérique principalement connue pour ses avancées dans les domaines de l'écriture, de l'art, de l'architecture, de l'agriculture, des mathématiques et de l'astronomie. C'est une des civilisations précolombiennes les plus étudiées avec celles des Aztèques et des Incas. Elle occupait à l'époque précolombienne un territoire centré sur la péninsule du Yucatán, correspondant actuellement à une partie du sud du Mexique, au Belize, au Guatemala, au Honduras et au Salvador. C'est l’une des plus anciennes civilisations d'Amérique et ses origines remontent à la préhistoire. La sédentarisation de populations est attestée, dans l'ère maya, à l'époque archaïque, entre le VIIe et le IIIe millénaire av. J.C. et cette civilisation possédait par ailleurs sa propre langue et une religion qui lui était propre.

La religion Maya est l'ensemble des croyances et des rites partagés à l'époque précolombienne par les Mayas, et dont il reste des pratiques très importantes dans certaines communautés indigènes mayas, notamment au Guatemala. Ce peuple croyait en la récurrence des cycles de création et de destruction. Les rituels et les cérémonies étaient étroitement reliés à ces multiples cycles terrestres et célestes. Le rôle du prêtre maya était d'interpréter ces cycles et de prophétiser les temps passés et à venir. Si des temps difficiles étaient prévus, il fallait faire des sacrifices pour apaiser les dieux.

Simon Martin, qui s’est spécialisé au cours des 30 dernières années dans l’histoire et l’héritage de cette civilisation, a été recruté par IRON MAIDEN pour veiller à ce que tous les aspects graphiques de l’album soient représentés fidèlement dans l’ancienne langue maya. Le chercheur a été choisi par le groupe pour faire un travail méticuleux de traduction des titres des chansons en hiéroglyphes mayas authentiques, expliquant : « Je suis presque la seule personne en Grande-Bretagne qui le fait, donc ils n’ont pas eu beaucoup de choix. J’ai rencontré les représentants d’IRON MAIDEN et ils m’ont parlé du concept. Ils ne voulaient pas que ce soit des bêtises, ils voulaient que ça soit réel, c’est pourquoi ils sont venus me voir. Beaucoup de mots qui composent les titres des chansons ne figurent pas dans le système de glyphe existant. Il existe environ 500 signes et seulement environ 150 d’entre eux sont des syllabes, le reste étant des mots entiers. Par exemple, le mot "nuages" apparaît dans l’une des nouvelles chansons de MAIDEN (Ndr : "Empire Of The Clouds") et « nuages » pourrait être un signe qui représente le mot entier, mais pour la plupart des titres je devais utiliser des signes phonétiques pour créer des mots. Alors en traduisant les titres en espagnol, puis dans la langue maya, nous nous sommes retrouvés avec une grammaire correcte et une bonne traduction pour les Mayas, transformable ensuite en hiéroglyphes. »

« The Book Of Souls » ne se veut pas un album concept dans le sens traditionnel du terme, chaque chanson ne retourne pas forcément au thème proposé par le titre de l’album, comme le souligne Simon Martin, et n’a pas d’origine spécifique dans la culture maya. Mais la préoccupation d’IRON MAIDEN pour l’esprit humain et son destin est certainement quelque chose que les anciens Mayas auraient reconnu et apprécié. Cette civilisation a quasiment disparu en deux siècles. Un consensus n’a pas été établi sur son déclin, mais plusieurs hypothèses sérieuses sont avancées. Les voici :

  • Un appauvrissement des sols.
  • Un dérèglement climatique amplifié par la déforestation.
  • Un système politique archaïque.
  • Des guerres intestines qui se produisent à l’intérieur d’une nation ou d’une collectivité.
  • La polygamie des élites et leur croissance démographique qui multiplient le nombre de princes prêts à s’affronter pour des positions de pouvoir.


''The Book Of Souls''

Le morceau-titre de l’album nous parle de la façon dont une civilisation aussi grande que celle des Mayas a fini par être détruite. Les paroles permettent de laisser une large place à l’imagination en évoquant les univers des enfers, les cycles astrologiques, l’architecture de la civilisation maya, les prophéties apocalyptiques et même une invasion extraterrestre. Tout cela pour arriver à l’endroit où les ancêtres gouvernent : le livre des âmes. Pas besoin d’en dire plus, vous qui venez tout juste de lire ci-dessus une longue introduction évoquant les Mayas.

La superbe illustration intérieure de l’album signée Anthony Dry.
 


Le dessin de la pochette est quant à lui l’œuvre de Mark Williamson, déjà responsable des pochettes du « Live At Donington » (réédition 1998) et « Best Of The B-Sides » tiré du coffret « Eddie’s Archives » (2002).


''Death Or Glory''

''Aces High'', ''Tailgunner'' et ''Death Or Glory'', le domaine de l’aviation et son rôle prépondérant lors des deux Guerres mondiales est récurrent chez IRON MAIDEN et plus particulièrement pour Bruce Dickinson, bien que ''Aces High'' soit un titre signé par Steve Harris seul. Acquéreur d’un Fokker Dr.I, le chanteur s’est presque vu dans l’obligation d’écrire des paroles sur le personnage historique que fut « Le Baron Rouge ». Sa célébrité et surtout son surnom, sont liés à son Fokker Dr.I Triplan peint en rouge vif au lieu des traditionnelles couleurs de camouflage.

Manfred Albrecht, Baron von Richthofen (1892- 1918) est un aviateur allemand qui est resté une légende de l'aviation de la Première Guerre mondiale. A l'époque, il était connu en France sous les surnoms de « Baron rouge » ou « Diable rouge » mais le surnom donné par les aviateurs britanniques (« the Red Baron ») a fini par s'imposer dans le monde entier pour se référer à lui, au point de remplacer en popularité son nom authentique. Avec 80 victoires confirmées selon le système de comptage allemand, il est considéré comme « l'as des as » de l'aviation de la Première Guerre mondiale bien que cette dénomination soit bien moins drôle que le film du même nom, tourné en 1982 avec Jean-Paul Belmondo en vedette.
 


 


 

 

''Tears Of A Clown''

All alone in a crowded room
He tries to force a smile
The smile it beamed or so it seemed
But never reached the eyes, disguise
Masquerading as the funny man do they despise

« Seul dans une salle pleine
Il essaie de se forcer à sourire
Sourire rayonnant ou du moins le semblait-il
Mais qui n’atteint jamais les yeux, un déguisement
Se faisant passer pour l’homme drôle qu’ils méprisent
 »

Telles sont les paroles débutant la chanson "Tears Of A Clown" qui parle de la tristesse cachée sous les rires, le fait d’afficher un visage souriant à l’extérieur alors que l’on ne va pas bien à l’intérieur. Ce titre rend ainsi hommage à Robin Williams, un humoriste et acteur américain et qui s’est donné la mort en 2014. Il débute au cinéma dans le rôle-titre du Popeye de Robert Altman et se fait connaître du public avec la série télévisée Mork And Mindy en interprétant le rôle de l’extra-terrestre Mork. Aussi à l’aise dans le domaine comique que dramatique, on se souviendra de lui notamment pour ses rôles dans Good Morning Vietnam, Le Cercle des Poètes Disparus, Mrs. Doubtfire ou Jumanji pour ne citer que ceux-là. Robin Williams a notamment remporté l'Oscar du meilleur acteur dans un second rôle pour son interprétation dans Will Hunting.
 


''Empire Of The Clouds''

Attention, pavé ! Nous sommes ici en présence du plus long morceau de toute la discographie d’IRON MAIDEN, culminant à 18 minutes et 4 secondes, détrônant ainsi le précédent détenteur du titre, à savoir "Rime Of The Ancient Mariner" sur l’album « Powerslave » en 1984 qui affiche seulement ( ! ) 13 minutes et 33 secondes au compteur. Cette colossale durée était sans doute nécessaire pour narrer l’histoire de ce colossal engin connu sous le nom de R101.

Le R101 est un dirigeable britannique qui s'écrasa le 5 octobre 1930 sur une colline de la commune d'Allonne, proche de Beauvais en France, alors qu'il assurait une liaison entre Londres et Karachi au Pakistan. C'est le troisième accident de dirigeable le plus meurtrier de l'histoire après celui de l’USS Akron (73 morts en 1933), celui du Dixmude français (50 morts en 1923) et devant celui de l’Hindenburg (37 morts en 1937). Le R101 partit le 4 octobre à 18 h 24 à destination de Karachi, avec une escale de ravitaillement prévue à Ismaïlia en Égypte, sous le commandement du Lieutenant Carmichael Irwin. Parmi les passagers se trouvaient Lord Thomson, Ministre de l'Air et Sir Sefton Brancker, directeur de l'aviation civile britannique. Le dirigeable lâcha 5 tonnes d'eau de ses ballasts pour prendre de l'altitude. Au-dessus de la Picardie, vers 2 h du matin, le R101 rencontra des rafales de vent qui déchirèrent l'enveloppe extérieure supérieure du dirigeable, provoquant une première rupture d'un des ballons de gaz. Le R101 finira par s'écraser sur une colline sur la commune d'Allonne, juste au sud de Beauvais, à seulement 20 km/h. L'accident enflamma les fuites d'hydrogène et l'incendie embrasa rapidement l'ensemble du dirigeable. 46 des 54 passagers et membres d'équipage furent tués et deux blessés décédèrent à l'hôpital, portant le total à 48 morts.

Le morceau sortira à l'occasion du Record Store Day 2016 et dont la pochette avant sera une illustration où l'on voit le R101 quand le verso sera la reproduction de la une du Daily Mirror édité le 6 octobre 1930.
 


 


 


 


 


Concernant le titre de cette chanson, il serait étonnant que Bruce Dickinson, en féru d’aviation qu’il est, n’ait pas eu vent de cet ouvrage écrit par James Hamilton-Paterson et traitant de l’importance qu’a eue un jour l’aviation anglaise sur le reste du monde. Il est des coïncidences qui n’en sont pas toujours moi, je vous dis…
 


Et pour clore ce seizième et dernier chapitre (pour l’instant !), la version live de "Death Or Glory", extraite du live « The Book Of Souls – Live Chapter », dont la version vidéo n’est sortie qu’en streaming, presque un crime de lèse-majesté pour les fans qui n’ont pu tenir l’objet entre leurs mains. Le morceau en question a été capté lors du passage du groupe à Wroclaw en Pologne le 3 juillet 2016, chaque titre étant issu de concerts différents. 
 


Je tiens à dédier l’ensemble de ces seize articles à Guillaume B. Decherf, notre ami et collaborateur disparu dans les circonstances tragiques que l’on sait au Bataclan en novembre 2015 et avec qui j’avais eu tout juste le temps d’échanger au sujet de ce disque tout juste paru alors, lui qui était un immense fan de la Vierge de Fer. Et s’il lit ceci, merci à Bruce de lui avoir rendu hommage lors du concert parisien donné en juin 2016 en préambule du morceau "Blood Brothers".

« Oh well! Wherever, wherever you are! Iron Maiden’s gonna get TEACH you, no matter how far! » Voilà, c’est en paraphrasant les paroles de la chanson "Iron Maiden" que s’achèvent ainsi ces seize semaines consécutives en compagnie d’IRON MAIDEN, voyage au sein de leur discographie et de toutes les références que de très nombreuses chansons contiennent. J’espère que vous avez pris autant de plaisir à lire ces articles que j’ai eu à effectuer ces recherches et à les compiler en compagnie de Laurence Faure pour vous, lecteurs et lectrices, fans ou non du groupe et que vous aurez ainsi pu replonger ou redécouvrir d’un œil neuf, du moins différent, ces morceaux qui font partie de la bande-son de notre vie, de la mienne en tout cas assurément. « UP THE IRONS! »


« Iron Maiden » (1980)
« Killers » (1981)

« The Number Of The Beast » (1982)
« Piece Of Mind » (1983)
« Powerslave » (1984)
« Somewhere In Time » (1986)
« Seventh Son Of A Seventh Son » (1988)
« No Prayer For The Dying » (1990)
« Fear Of The Dark » (1992)
« The X Factor » (1995)
« Virtual XI » (1998)
« Brave New World » (2000)
« Dance Of Death » (2003)
« A Matter Of Life And Death » (2006)
« The Final Frontier » (2010)

 

 

Photos – Source : Wikipedia Creative Commons

Blogger : Jérôme Sérignac
Au sujet de l'auteur
Jérôme Sérignac
D’IRON MAIDEN (Up The Irons!) à CARCASS, de KING’S X à SLAYER, de LIVING COLOUR à MAYHEM, c’est simple, il n’est pas une chapelle du metal qu'il ne visite, sans compter sur son amour immodéré pour la musique au sens le plus large possible, englobant à 360° la (quasi) totalité des styles existants. Ainsi, il n’est pas rare qu’il pose aussi sur sa platine un disque de THE DOORS, d' ISRAEL VIBRATION, de NTM, de James BROWN, un vieux Jean-Michel JARRE, Elvis PRESLEY, THE EASYBEATS, les SEX PISTOLS, Hubert-Félix THIÉFAINE ou SUPERTRAMP, de WAGNER avec tous les groupes metal susnommés et ce, de la façon la plus aléatoire possible. Il rejoint l’équipe en février 2016, ce qui lui a permis depuis de coucher par écrit ses impressions, son ressenti, bref d’exprimer tout le bien (ou le mal parfois) qu’il éprouve au fil des écoutes d'albums et des concerts qu’il chronique pour HARD FORCE.
Ses autres publications

1 commentaire

User
Toto El Baxxozorus
le 04 mai 2019 à 07:07
Simplement ; merci et bravo !
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